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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 30 Oct 2014 - 7:57
Louange mécanique
Un film d’animation français. Avec des chansons. Et Grand Corps Malade. La motivation n’était pas optimale, d’autant que Dionysos, pour sympathiques qu’ils soient, m’irritent un peu avec leur poésie pour post-adolescents. On ne peut que saluer les efforts plastiques réalisés pour le film : l’esthétique proposée est cohérente, et joue sur deux tableaux qui cohabitent avec malice : d’un côté, un aspect vintage s’inspirant directement d’un des protagonistes, à savoir Georges Méliès : dans un jaune doré évoquant Jules Verne, on joue sur le bricolage, les cartes qui se déplie et un aspect stop motion souvent réjouissant, comme lors des scènes de voyage en train. De l’autre, l’exploitation de toutes les ressources de l’animation numérique, souvent pour le meilleur (textures, décors à la Tim Burton (un peu trop au départ, d’ailleurs), mouvement effrénés dans la course du train fantôme…), parfois avec un brin de mauvais gout, notamment par l’abus des travellings à 360° autour des personnages qui chantent. Jack et la mécanique du cœur brode sur un scénario relativement éculé une ambition assez débordante que ses graphismes prennent bien en charge : d’une ville écossaise au western andalou, du cinéma muet à Jack l’éventreur, l’idée semble bien d’en mettre plein la vue. Le plus souvent, le charme opère ; il est toutefois surprenant de constater que le récit qui s’attache à suivre la mécanique d’un cœur qui ne doit pas battre trop vite souffre d’un rythme assez lâche, les séquences de bravoure s’enchainant sans toujours trouver leur liant. Reconnaissons tout de même que le pari est remporté par Malzieu, qui après son album et son roman trouve un terrain à la mesure de ses ambitions narratives.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 30 Oct 2014 - 9:25
Pas du tout tenté par la bande-annonce, visuellement c'est pas mon trip et musicalement c'était déjà le début de la fin (voire une fin bien avancée) pour Dionysos.
Par contre j'ai vu Patéma et le monde inversé, beau film d'animation japonais dont le concept (une planète et ses habitants scindés en deux dimensions cohabitantes aux gravités inverses, l'une dictatoriale à la surface, et l'autre libre et souterraine) donnent lieu à des séquences assez vertigineuses.
De quoi oublier les quelques poncifs sur la tolérance, un méchant un peu trop unidimensionnel et de légers traits d'hystérie typiques des séries adolescentes... parce qu'il y a aussi du Miyazaki là-dedans et ça fait plaisir à voir (et à ressentir).
Azbinebrozer personne âgée
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 30 Oct 2014 - 10:01
RabbitIYH a écrit:
Pas du tout tenté par la bande-annonce, visuellement c'est pas mon trip et musicalement c'était déjà le début de la fin (voire une fin bien avancée) pour Dionysos.
Par contre j'ai vu Patéma et le monde inversé, beau film d'animation japonais dont le concept (une planète et ses habitants scindés en deux dimensions cohabitantes aux gravités inverses, l'une dictatoriale à la surface, et l'autre libre et souterraine) donnent lieu à des séquences assez vertigineuses.
De quoi oublier les quelques poncifs sur la tolérance, un méchant un peu trop unidimensionnel et de légers traits d'hystérie typiques des séries adolescentes... parce qu'il y a aussi du Miyazaki là-dedans et ça fait plaisir à voir (et à ressentir).
Lapinou je te recommande pas Upside down qui est une version film américaine, vu dans l'avion, et qui n'avait pas réussi ni à me tenir bien éveillé, ni bien endormi !...
Goupi Tonkin la séquence du spectateur
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 30 Oct 2014 - 17:24
En fait, c'est un remake 80's (même si l'esthétique assez dépressive du film relève plus de la grisailleuse et marronnasse fin des 70's ) et déguisé de Seuls sont les indomptés... donc c'est bien.
oh, un hélicoptère !
oh, un hélicoptère !
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Ven 31 Oct 2014 - 14:31
Another brick in the mall
Face au déluge de briques pixellisées que nous déverse ce film, il est nécessaire de faire le tri pour s’en faire une idée à peu près cohérente.
Epileptique, délirant, il est avant tout construit comme un cartoon assez proche de Tex Avery, fatiguant et hurlant, mais souvent jubilatoire. On saluera la malice avec laquelle il joue de son postulat, les briques : c’est d’abord une limite, celle de la forme et des carrés qui rappellent les débuts du film d’animation, et qui donnent ici une touche assez originale et artisanale dans les effets d’eau, de fumée, ou de flammes ; mais c’est aussi le potentiel infini de construction, à savoir l’aspect séduisant des Transformers enfin intelligemment exploité. C’est d’ailleurs l’un des centres du scénario que de défendre l’imaginaire, la construction sans plan et la possibilité de détruire pour reconstruire.
Cette jolie morale passe par une exposition satirique qui aura le mérite de plaire aux adultes et passera probablement bien au-dessus des enfants qu’ils accompagnent. La société dystopique où l’uniformité et l’imbécilité heureuse règnent en maitre est un agréable point de départ, saturé de références à notre société de consommation (j’ai beaucoup aimé le café à 42 dollars). L’ironie, souvent présente dans les films d’animation, atteint ici son apogée, qu’elle gangrène la figure du héros qui n’en est pas un ou par la parodie constante et les références à tout ce qui fait la culture pop des spectateurs, de Batman à Star Wars, habile façon de dérouler l’impressionnant catalogue des franchises détenues par Lego. Mention spéciale au regard oblique porté aux parents par l’astronaute des années 80 et son bas de casque brisé : j’ai cru qu’ils l’avaient cherché dans mon passé.
Car on ne s’y trompe évidemment pas : la publicité que fait la marque pour ses briques est d’une intelligence assez redoutable : logée au cœur d’un discours apparemment anticonformiste, valorisant l’imaginaire, l’initiative personnelle et la démocratie, le récit parvient à faire de ses jouets l’étendard d’un idéal moral et comportemental. Lego est effectivement, à l’image de son président Business, partout : dans les rayons de jouets, les jeux vidéo, et dans le sillage de tous les blockbusters des dernières années. Doté de cette arme absolue qu’est l’autodérision, la marque s’offre une vitrine grand luxe pour un catalogue en 3D qui proclame sa toute puissance, sa malice et son règne dans les franchises et les cœurs, grâce à cette ode à la construction personnelle.
Bravo aux responsables du service marketing, c’est du très beau boulot.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 1 Nov 2014 - 10:17
“Sometimes there is a man”, hors des vicissitudes L’œil au risque aguerri, les jambes écartées De diverses boissons la barbe maculée Faites place au champion, l’inénarrable Dude.
Chômeur invétéré sans réelle doctrine Ecoutant le Creedence et le chant des baleines Ce branlos en short ne se foulera pas l’aine Avant que l’on imbibe son tapis d’urine
C’est surtout à Walter, son compagnon de boule, Que l’on doit la ferveur d’une geste grandiose Où la mauvaise foi, et beaucoup d’ecchymoses Jalonnent un beau parcours que la lose chamboule.
Vétéran grande gueule au regard frapadingue Intimant à ses ouailles de bien fermer leur gueule Walter ne parle pas, il éructe et dégueule Argumentant parfois à l’aide de son flingue.
Haro sur ces blaireaux de « fucking amateurs » ! Au jeu des bras cassés on se tire la bourre On croit faire des doigts que dans l’œil on se fourre On coupe des orteils, on se file des leurres.
Et la ville répand son flot de branquignoles Producteurs de porno, nihilistes allemands, Artistes déjantés, trampolineuses nues, Dans une orgie de cris, de fouine et de torgnoles.
Mais c’est par le bowling aux courbes équivoques Que se déploie ici la vraie mythologie : Boules saisies par de girondes walkiries Ou léchées par Jésus le roi de la breloque, Polies sur la surface de cire miroitante Elles fusent à grand train vers la béance sombre Univers onirique, où le gras Dude sombre Dans une émotion baroque et turgescente
De la vie au trépas, du destin et sa meule, Nos héros sans répit exécutent la danse. Le Dude malgré lui livre sa descendance Et quand Donny s’éteint, fâcheuse dissonance On disperse ses cendres… qu’on se prend dans la gueule.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 1 Nov 2014 - 11:42
génial !
Goupi Tonkin la séquence du spectateur
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 1 Nov 2014 - 14:12
Une femme dangereuse, dans la langue de Franck Ribéry - 1940
Bogart jeunot, Raft confirmé, la délicieuse Ann Sheridan et la merveilleuse Ida Lupino : Casting 5 étoiles !!!! Les deux mêmes scénaristes que pour Les fantastiques années 20 . Et, of course, Raoul Walsh aux commandes. Ce film injustement jugé "brillant mais un peu mineur" par les walshiens ultra est pourtant pour moi une source de bichage à chaque revoyure. Mise en scène sans faille, rythme du récit incroyable. Walsh, ça swing !!! La quintessence du cinéma que j'aime vraiment.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 2 Nov 2014 - 10:27
Mieux vaut Tarr que jamais
(je pense que le lapin va s’énerver... )
Les capacités hypnotiques indéniables des Harmonies Werckmeister sont un écran de fumée suffisant pour qu’on s’arrête à lui et qu’on crie au génie. C’est d’ailleurs l’un des sujets du film : la rumeur, l’hystérie collective, la confusion d’un discours qui galvaniserait une frange de la nation contre une autre, le silence fascinant d’un monstre marin en état de décomposition ou les harmonies perdues d’un instrument de musique.
A chaque fois, la béance est celle d’un discours : soit qu’il est absent, soit qu’il est instable au regard de nos exigences rationnelles. Restent les épiphanies cosmogoniques, (l’ouverture) ou les trajets dans un univers urbain indéchiffrable qui semble lentement se noyer. L’infinie tristesse qui se dégage du film, renforcée par une musique (1) aussi pudique que désespérée (qui n’est pas sans rappeler les prémices des grands morceaux de Godspeed You ! Black Emperor) est d’ordre poétique, et l’on peut aisément y enfouir les autres sentiments contradictoires que celui-ci génère pourtant.
On le sait, l’esthétique est entièrement fondée sur les plans-séquences. Au service du récit, ou plutôt de son étiolement, ils permettent une immersion par le choix d’un point de vue singulier. Si l’on considère la façon dont on suit Janos dans ses longues marches, Tarr nous contraint à une vision parcellaire des paysages ou des intérieurs qu’il traverse. C’est particulièrement vrai dans son tour de la baleine, qui vue de trop prêt, sans recours réel au conventionnel plan large, se dévoile par fragments d’une inquiétante étrangeté. Il en va de même pour tout un pan de la ville, et cette façon de se river aux personnages distille une angoisse qui serait celle de l’incapacité de l’individu à déchiffrer le monde dans lequel sa destinée le propulse. L’autre grand choix est celui de la gestion du temps. Dans sa première partie, c’est surtout d’un temps réel qu’il s’agit comme celui du coucher de l’oncle. Exhaustif, sans concession faite à la traditionnelle ellipse. Mais Tarr va plus loin par l’esthétique de la dilatation : c’est le cas de plusieurs scènes de marche, solitaire, à deux, ou celle de la foule. La durée des plans séquences est alors proprement déraisonnable. Pour tout dire, j’en ai ri, nerveusement, peut-être, mais avec le sentiment très net qu’on perdait ici toute commune mesure.
La question est donc la suivante : quelle intention dans cette volontaire inefficacité narrative ?
Celle de l’hypnose, sans doute, mais aussi, à mon sens, celle de faire surgir une angoisse qui renverrait le spectateur à son confort et la remise en question de ses attentes codées : au visionnage de ces plans, on prend comme rarement la mesure de ce qui nous semble être la juste durée, et l’attente de plus en plus nerveuse du passage à une nouvelle séquence. Pour efficace et pertinente qu’elle soit, cette réflexion a aussi le don fâcheux de nous extraire de notre empathie au film en nous forçant à opérer sur lui une réflexion critique. C’est aussi le cas du rapport aux plans-séquences, et l’un des aspects qui me dérange dans le film. Leur durée, leur complexité (qu’on pense à l’extraordinaire chorégraphie lors du sac de l’hôpital, la caméra rentrant dans chaque salle, effectuant un demi-tour tout en suivant l’action de tous les personnages) a bien entendu toutes les critères de ce que qu’on peut qualifier de virtuose ; la question est de savoir dans quelle mesure le défi technique ne supplante pas le propos.
Chez Tarkovski, la corrélation entre fond et forme est indéniable, et la sacralité de la scène semble dicter la lenteur d’un mouvement ou la durée d’un plan. Ici, cela semble plus discutable, et l’on est souvent en droit de se questionner sur la radicalité formelle qui peut s’apparenter à une posture, une distinction un peu trop ostentatoire.
Il ne s’agit pas de nier la force poétique du film, ni sa capacité à subjuguer. Mais de rendre compte de la très légère déception d’avoir eu le sentiment, au détour d’une fulgurance, d’en voir les coutures de temps à autre. (7.5/10)
(1)
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 2 Nov 2014 - 10:48
Pas tenté du tout mais j'ai jamais vu aucun Bela Tarr.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 6:50
RabbitIYH a écrit:
Pas tenté du tout mais j'ai jamais vu aucun Bela Tarr.
Apparemment, c'est de loin le plus abordable. Le Tango de Satan, par exemple, dure 7h30.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 6:51
Le zèle de l’enfer
Porté par le succès critique de son premier opus Animal Kingdom, David Michôd passe ici à la vitesse supérieure, comme en témoigne sa sélection cannoise. Deux ambitions se conjuguent ici : l’aspect visionnaire d’un film d’anticipation serti dans une œuvre qui ne cessera d’affirmer sa patte d’auteur. Soit une Australie « 10 ans après la chute », dont on ne nous dira rien, puisque tel est le parti pris : de ce monde, ce qu’il reste est le manque et le deuil sonné de ce qui n’existe plus. Plus de nom, plus d’idéal, plus de quête. Impossible de ne pas penser à La Route, qu’on exploiterait ici dans son versant désertique. Le minimalisme contamine absolument tout : les scènes sont souvent muettes, la couleur déserte un monde à la lumière blafarde, et les enjeux dramatiques sont (un peu trop) systématiquement désactivés. Un dialogue avec une grand-mère révèle l’ineptie de l’émotion en ces temps d’apocalypse sourde. On peut certes ponctuer une transaction par une giclée de cervelle sur les murs, les morts eux-mêmes se joignent au concert du silence : ils tombent sans bruit, et l’on passe à autre chose. Une route, des bicoques sans âme, des visages déformés par la misère et le pessimisme, des fusils qu’on brandit : il s’agit d’avancer, pour fuir la mort et foncer vers elle. La maitrise est indéniable, et Michôd livre une partition sur laquelle rien n’a été laissé au hasard. Clair-obscur des intérieurs, visages isolés dans la nuit, lenteur des mouvements de caméra, gestion d’un rythme déconcertant d’inactivité, rien n’échappe à son contrôle. Soucieux de ne pas retomber dans la norme, il prend le contrepied des attentes du spectateur : on attend l’évocation du passé du personnage principal, de même qu’une évolution dans l’étrange duo qu’il forme avec son pseudo otage (Pattinson entre contre-emploi par rapport à ses personnages glaciaux chez Cronenberg, mais à la limite du cabotinage). Si l’on en parle, c’est pour mieux en révéler les béances et la vacuité. Car le véritable propose du film est bien l’absurde, et ce soleil écrasant n’est pas sans évoquer celui de l’Etranger de Camus. Ce qui pèse, c’est l’absence de châtiment, et la facilité avec laquelle on tue dans un monde où la milice elle-même ne comprend pas sa mission. De fait, l’intrigue se voit gangrénée par cette lèpre qui va désactiver ses enjeux. La véritable quête hébétée du protagoniste révélée par la dernière image enfonce le clou d’un pessimisme ravagé. Maitrise, profondeur du propos, radicalité : tout semble fonctionner pour nous imposer un grand film. Le problème, est bien là : on nous l’impose. La musique est en cela révélatrice : grinçante, lancinante, angoissante, elle surligne un projet étouffant par ses intentions, et qui finit par anesthésier son spectateur en même temps que ses personnages. Courageux dans sa volonté de se démarquer, Michôd pèche par excès de zèle. En reste une grande promesse quant à la suite de sa filmographie.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 7:07
Nulladies a écrit:
Porté par le succès critique de son premier opus Animal Kingdom, David Michôd passe ici à la vitesse supérieure, comme en témoigne sa sélection cannoise. Deux ambitions se conjuguent ici : l’aspect visionnaire d’un film d’anticipation serti dans une œuvre qui ne cessera d’affirmer sa patte d’auteur.
Désolé mais j'ai bien ri. Film anti-cannois, anti-auteurisant par excellence (musique fabuleuse d'ailleurs, la meilleure BO de l'année ), tout est au service de l'atmosphère et des personnages puisque ces extérieurs pesants, désertiques, brûlés par le soleil ne sont rien d'autre que la projection de leur psyché. Prétendre que Michod s'impose en tant qu'auteur après avoir encensé, hum, au hasard, Under the Skin, ça se passe de commentaire. D'autant qu'Animal Kingdom, film Sundance typique, était bien plus proche de ces dérives-là que ne l'est The Rover.
Belle comparaison avec L'étranger sinon.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 7:16
On va pas recommencer le débat sur ce ressort de "l'auteur" poseur pour toi ou non. J'ai trouvé qu'il en faisait trop par moments, c'est aussi simple que ça. Et alors, meilleure B.O de l'année des grincements pour dire que bouh, l'ambiance est poisseuse, trois fois
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 7:34
Rien à voir avec l'ambiance poisseuse, les lancinances de la BO évoquent clairement l'obsession absurde de Guy Pearce... et pour l'amateur de Colin Stetson et William Basinski que je suis c'est un régal (un seul morceau de chacun je crois mais le reste est clairement dans l'esprit). Bref... j'admets que c'est subjectif mais s'échiner à extrapoler sur les singularités de mise en scène d'un pur film de genre (qui déjoue certes les codes dramaturgiques attendus mais c'est justement tout à son honneur) quand c'est cette même omniprésence de l'auteur que tu salues dans des tas de films où les auteurs ne font que ça, se montrer... je sais bien que c'est le forum de la mauvaise foi mais tout de même.
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 8:27
Ce qui compte, ce ne sont pas les codes et l'idéologique a priori, mais la façon dont le film parvient ou non à distiller son atmosphère. Dans Under the Skin, ça a fonctionné pour moi, dans The Rover, beaucoup moins, parce que certains excès (de lenteur, de noirceur, d'insistances) ont créé une distance. On peut ensuite jouer à celui qui se veut le plus dogmatique en posant du verbiage (auteur, anti auteurisant, film de genre, blablabla), je ne joue pas dans cette catégorie. J'essaie juste d'expliquer (de m'expliquer, en fait) ce qui a fonctionné ou pas, et par quels procédés l'auteur décidé de traiter son sujet.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 10:43
Je parle pas d'idéologie abstraite mais bien d'effet, ça n'est bien sûr que mon impression comme ça n'est rien d'autre que la tienne quand tu fais la critique d'un film mais je trouve ça bizarre, c'est tout. Les films de genre chez toi (essentiellement actuels) sont souvent trop démonstratifs d'une ambition démesurée blabla alors que de toute évidence pour moi, l'auteur s'y efface davantage (ce qui ne veut absolument pas dire qu'il y parle moins de lui, c'est d'ailleurs bien souvent le contraire). La mise en scène de ce film est de très loin celle qui m'a le plus impressionné cette année. Profondeur de champ écrasante, tension omniprésente et pourtant complètement minimaliste, tout comme la musique d'ailleurs. J'ai vraiment énormément de mal à comprendre que pour toi l'auteur veuille imposer quoi que ce soit, alors qu'il n'y a ni grandiloquence, ni message, ni même dramaturgie à outrance puisque comme tu le dis si bien, c'est même plutôt le contraire. En quoi Michod ne cesse d'affirmer sa patte d'auteur, alors que comme tu le dis bien aussi, le film rappelle énormément The Road, The Proposition, les films de son compère australien John Hillcoat en général. On y parle peu, la psychologie se devine en creux mais on ne s'y attache jamais. Tu parles d'excès de zèle sans expliquer pourquoi, quel peut bien être l'excès de zèle d'un film quasiment sans enjeu, sans discours, qui ne fait que témoigner d'une vision de la nature humaine ? En fait on dirait qu'un film de genre ne peut être simplement - et naturellement - singulier dans son radicalisme narratif, ambitieux dans la maîtrise de sa mise en scène sans que cela te gêne, quelque part ?
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 10:53
Peut-être, pour répondre à ta dernière question, je ne sais pas. Et pour le reste, le fait de désactiver de façon aussi radicale les enjeux habituels est aussi évidemment une pose (le terme est un peu trop péjoratif, mais tu me comprends). Bien sûr que c'est du zèle que cette lenteur, que ces cadrages, que cette lumière, qui, je le répète, sont très réussis. Pour tout dire, j'ai mis 7/10 au film, c'est juste une réserve, pas une condamnation générale. Le type a clairement du talent, mais on peut être excessif dans le pathos comme dans la neurasthénie, et j'ai trouvé pour le coup que l'équilibre général en était un peu affecté. La plus grande réussite de la mise en scène, c'est ce point d'équilibre, extrêmement ténu. J'ai eu les mêmes réserves dans Leviathan, un excès qui glace un peu.
...et là, je te vois revenir à la charge avec Under the Skin. Joker, il a fonctionné, j'ai vraiment été fasciné, même si tous ses ecxès sont évidents. On rentre ici dans une subjectivité qui confine à l'indicible.
Goupi Tonkin la séquence du spectateur
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 3 Nov 2014 - 13:50
Ça la fout un peu mal pour l'auteur du virulent et fameux article intitulé Une certaine tendance du Cinema Français, mais ce fort joli film, très écrit et bien écrit, est assez "Aurenche & Bost style"...
Nulladies Cinéman
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 4 Nov 2014 - 8:10
Au bout du rouleau
Il faut un certain temps pour comprendre le propos réel de Graffiti Party. Les débuts assez longs, voire répétitifs sur l’ambiance Spring Break de la jeunesse décomplexée des années 60, entre beuverie, flirts et baston, nous laissent entrevoir un teenage movie vaguement nostalgique, le film datant de 1979. S’y distinguent trois amis dont on suivra les destinées parallèles. « Nobody surfs forever », déclare un des protagonistes adultes, Bear, dès le départ. Progressivement, les séquences filmant les vagues, à différentes saisons, accompagnées d’une voix off légèrement caverneuse dilatent les ambitions du film. On pense bien entendu à l’ellipse sublime de Mme Muir, où la mer déchainée indique avec force l’injure du temps. Ici, le passage vers l’âge adulte se fera le plus souvent dans le renoncement. C’est d’abord l’épisode central de la mobilisation pour le Vietnam, où les singeries deviennent des motifs de survie pour être reformé. En toile de fond, la guerre scarifie les personnages, rivés à ce lieu qu’on ne quitte jamais, et dont on voit la lente métamorphose : Bear qui se décatit, la nouvelle jeunesse qui prend le relais, les accès à la berge condamnés. L’océan, lui, reste le même, vestige aussi grisant que figé d’un âge d’or dont on ne peut se débarrasser, qui engourdit et enthousiasme à la fois. Graffity Party ne raconte pas grand-chose, et prend son temps pour le faire. Et fonctionne. Le temps passe, les muscles s’atrophient et l’alcool ravine les cerveaux. L’Amérique a la gueule de bois, mais garde le sourire sous un éclatant soleil. En ce sens, il est l’antithèse de Point Break, tout en traitant du même sujet : pas d’intrigue, pas d’héroïsme, mais la quête romantique du Big Swell, l’attente de l’instant parfait, dangereux et spectaculaire. La séquence finale sera la récompense du spectateur. Dilatée jusqu’à la déraison, elle explore l’osmose entre l’individu et l’élément, dans une fluidité imparable. Le surf, dit le film, n’est pas la frime : on le constate dès l’ouverture, où la musique très douce tend à contredire les clichés l’accompagnant généralement ; c’est un état d’esprit, une suspension poétique, et dans cet épilogue, l’expression la plus franche d’un lyrisme échevelé. Le temps suspend son vol sur la crête de la vague, et le sillage dans son rouleau dessine son passage ici-bas : une écume cinglante, harmonieuse et éphémère.
Invité Invité
Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 4 Nov 2014 - 14:24
Goupi Tonkin a écrit:
Ça la fout un peu mal pour l'auteur du virulent et fameux article intitulé Une certaine tendance du Cinema Français, mais ce fort joli film, très écrit et bien écrit, est assez "Aurenche & Bost style"...
Pas faux... d'ailleurs tout est (très très) bon chez Truffaut mais celui-là un peu dispensable par rapport au reste je trouve.
Zwaffle un mont de verres
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 4 Nov 2014 - 14:45
RabbitIYH a écrit:
Goupi Tonkin a écrit:
Ça la fout un peu mal pour l'auteur du virulent et fameux article intitulé Une certaine tendance du Cinema Français, mais ce fort joli film, très écrit et bien écrit, est assez "Aurenche & Bost style"...
Pas faux... d'ailleurs tout est (très très) bon chez Truffaut mais celui-là un peu dispensable par rapport au reste je trouve.
c'est normal que la croix gammée soit à l'envers sur l'affiche ?
Goupi Tonkin la séquence du spectateur
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 4 Nov 2014 - 17:03
RabbitIYH a écrit:
Goupi Tonkin a écrit:
Ça la fout un peu mal pour l'auteur du virulent et fameux article intitulé Une certaine tendance du Cinema Français, mais ce fort joli film, très écrit et bien écrit, est assez "Aurenche & Bost style"...
Pas faux... d'ailleurs tout est (très très) bon chez Truffaut mais celui-là un peu dispensable par rapport au reste je trouve.
je l'ai aussi très longtemps considéré comme mineur. J'ai un peu changé d'avis aujourd'hui. C'est un beau film à l'ancienne, comme on l'imagine aujourd'hui : scénario très écrit avec dialogues ad hoc, têtes d'affiches servies par une belle partition et seconds rôles très soignés, du romanesque, un secret, une histoire d'amour à trois, un microcosme observé avec précision mais générosité un peu à la manière de Becker... C'est du Truffaut un tantinet embourgeoisé, confortable et moins débraillé, formellement très sage mais avec de belles qualités d'écriture et d'interprétation, d'où mon parallèle avec Aurenche et Bost.
Invité Invité
Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 4 Nov 2014 - 22:11
Oui c'est tout à fait ça. Et un très joli film tout de même, c'est vrai. De toute façon aucun Truffaut ne m'a jamais déçu. Me restent à voir Une belle fille comme moi, L'argent de poche et L'amour en fuite.
Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 5 Nov 2014 - 9:20
Crues, ruine et dépendance
Allongé, le visage replet de satisfaction béate, Biswamghar Roy écoute. D’une passivité offerte, son corps s’oublie au profit d’une émotion qui efface le monde alentour, celle de la musique qui emplit son salon. Lancinante, répétitive, hypnotique : les cordes et les percussions tissent un écrin pour les voix, psalmodiant des mélopées d’un autre monde, pour l’auditeur occidental, certes, mais aussi pour les autochtones qui voyagent à son contact vers des ailleurs éthérés. Ray prend le parti de laisser toute sa place à cet art immatériel, effaçant toute ostentation de mise en scène durant les concerts pour que surgisse à travers l’écran l’émotion du personnage auditeur. Le concert final, qui s’accompagnera de la danse, est en cela renversant de maitrise : dilaté comme seuls les morceaux de musique indienne peuvent le faire, il captive et capture tout le cadre, instaure un crescendo émotionnel qui n’est pas sans évoquer les effets d’une drogue au long cours. Car c’est bien d’une dépendance que traite le récit : celle d’un faste perdu pour cet aristocrate fin de race, qui voit dans les concerts les plus sublimes l’affirmation d’une résistance à l’inévitable changement. Au dehors, la modernité s’installe : c’est le bruit des fanfares, du moteur des voitures, des groupes électrogènes. Au dehors, le temps passe et la nature se déchaine sur des terres que son propriétaire ne prend même plus le temps de passer en revue : l’eau les ravine, l’orage gronde et les flots engloutissent tout, y compris sa femme et son fils. Il faudrait se lever ; aller à la rencontre du monde. Mais Biswamghar double son idéalisme esthétique d’une trivialité idéologique. Cramponné à son droit du sang, méprisant la classe montante de la bourgeoisie, il continue à inviter : c’est aux autres de se rendre chez lui, où le témoignage de son prestige passe par de ruineux concerts. Si Ray fustige l’aveuglement d’un homme hors du temps qui perdra tout, il n’est pas plus tendre avec les parvenus qui l’entourent. La rivalité pécuniaire qui clôt le concert final en est la preuve : brusque retour sur terre, elle rabaisse et renvoie dos à dos deux classes sociales instrumentalisant les envolées hypnotiques et, croyait-on, atemporelles. Ray équilibre ainsi avec maestria sa partition : à l’épanchement de séquences amplifiées par l’émotion, aux lents zooms sur les visages soulignant l’émotion grandissante de l’auditeur et son parcours mémoriel vers un passé révolu, il offre en contrepoint un sens aigu des détails. C’est le lustre qui traverse tout le film, symbole du prestige, mêlant les miroitements de lumières aux sons cristallins, mais se mouvant comme le balancier d’une horloge ou se couvrant de toiles d’araignées, signes d’un invincible temps. Les scènes les plus pathétiques sont nimbées d’un éclairage presque expressionniste : les extérieurs de la découverte du corps de l’enfant montrent bien l’incapacité de Biswamghar à affronter le monde, qui se rappelle à lui de la façon la plus violente. Les lumières de l’intérieur, de plus en plus artificielles, sont travaillées par les domestiques eux-mêmes : la préparation du salon pour le concert final est en cela l’illusoire renaissance d’un passé perdu, et le chant du cygne de son propriétaire. L’insistance avec laquelle on déroule les tapis, on lave un miroir et recharge en bougie le lustre souligne de cette reconquête qui teintera les émotions musicales d’un pathétique plus intense encore. La place du miroir dans la chorégraphie finale, omniprésent et témoin silencieux du temps passé, est ainsi magistralement exploitée. A l’aube de cette acmé, l’ouverture des rideaux sur le soleil sera l’appel final pour Biswamghar. La course à cheval qui achève le film est l’exact contrepoint de tout le récit : sur une vaste et lumineuse plage où les coques échouées annoncent la beauté des choses dernières, elle offre au cavalier dépossédé la sépulture qu’il mérite : le ciel en est la seule limite.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 5 Nov 2014 - 10:46
A priori énorme trou dans ma culture cinéphile, je n'ai vu de Ray que Le monde d'Apu, très beau film même s'il ne m'avait pas non plus bouleversé. Pareil pour son presque voisin sri-lankais Lester James Peries dont le Changement au village m'avait autrement plus impressionné mais ses films semblent plus difficiles à trouver.
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Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8....