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| Voyage en salle obscure... | |
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Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 22 Déc 2014 - 7:11 | |
| Anesthésie focale. On ne peut nier les nombreuses qualités de Timbuktu, au premier rang desquelles on saluera le travail sur la photographie. Captant avec grâce la lumière si singulière d’un pays ocre, aride, portraitiste hors pair, Abderrahmane Sissako habille sa fable noire d’une robe solaire. Difficile d’oublier ces visages de femme, dignes dans l’adversité, et la paix d’une famille sous une tente qu’elle croit, un temps à l’abri de la folie des hommes. Là tout n’est que paix, calme et sérénité. A la ville, la milice islamiste instaure son code déviant. Gants et chaussettes pour les femmes, interdiction de la musique. Sissako choisit, et c’est tout à son honneur, de ne pas verser dans le pathos pour surligner l’indignation. Amateurs, les fondamentalistes sont tour à tour ridicules, un peu intimidés par leur pouvoir, et tentent sous le regard discrètement satirique du cinéaste de jouer le jeu des modèles : enregistrement de messages vidéos, interdiction du foot tout en devisant sur Messi et Zidane, etc. Dans la ville, on encaisse, on résiste, et l’horreur s’installe sans éclat, mais avec certitude : châtiments, lapidation et mariage forcé auront bien lieu, dans une étrange atonie, subie par tout le monde : personnages, auteur, spectateurs. Tout est noble dans ce film : la beauté authentique des personnages, la cause dénoncée, les paysages, la pudeur affichée. La scène centrale du meurtre du pêcheur atteste à elle seule de la maitrise de Sissako, dans un très beau et long plan d’ensemble fixe qui voit le meurtrier involontaire quitter les lieux de son forfait, un lac au couchant. Pourquoi, dès lors, ne pas adhérer, et rester en dehors de cette ville et du sort qui l’afflige ? Parce qu’on a du mal à relier tous les fils de ce récit composite, et parce que son unité de ton est problématique. Oscillant entre l’âpreté objective d’un Zviaguintsev et l’humour insolite d’un Elia Suleiman, dans un récit à la fois court et répétitif (comme ces longues scènes de dialogues traduits, censés illustrer la confusion et l’impossible accord entre les hommes aveuglés par leur cause), le film manque de liant et de clarté dans son traitement. S’il s’agissait d’anesthésier le spectateur pour lui faire subir la catatonie qui s’empare des citoyens, c’est réussi, mais on peut se faire une autre idée de la façon de traiter un tel sujet, particulièrement lorsqu’on est armé d’un tel talent à restituer la beauté du monde et de ses habitants. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 22 Déc 2014 - 7:27 | |
| - Azbinebrozer a écrit:
- Nulladies a écrit:
- Azbinebrozer a écrit:
Après avoir vu l'étonnant Bullhead voici un autre film de Michael R Roskam, cinéaste belge ? Bon film encore, plus conventionnel puisque film noir. On pourra trouver là encore que l'empathie vis à vis des personnages passe par une trop grande emphase, lenteur, effets un peu appuyés parfois oui, comme le jeu de l'acteur. Mais il y a là ce que j'aime chez Dennis Lehane, dont une nouvelle a inspiré le scénario. La violence n'est pas légère. Désolé pour ceux qui attendent de l'enlevé, du ciné champagne ! Il est passé deux trois fois en VO par chez moi et je l'ai loupé, j'attendrai sa sortie en vidéo. J'ai très envie de le voir, j'aime beaucoup Lehane, et Bullhead... en revanche, la critique n'a pas été tendre pour le coup, je suis un peu inquiet... L'ai vu en VO, jeu d'acteur intact, lent. A la sortie du film, dans les yeux de ta Dulcinée, tu liras peut-être toute la tendresse du pitbull. Généreux renversement ! Très fan de Lehane et donc très envie aussi de la voir celui-là (et parce Hardy et feu Gandolfini, deux acteurs généralement habités). |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mar 23 Déc 2014 - 7:22 | |
| « When you live with people, you know them better than you care to » Love is Strange porte bien son nom : traitant d’un sujet à la fois éculé et glissant, il avance en terrain miné. Raconter l’amour suppose un talent qui plane au-dessus des poncifs. Traiter de l’homosexualité du 3ème âge requiert du tact. On peut reconnaitre sans effort qu’Ira Sachs maitrise ces deux compétences. Cette histoire finalement très simple reprend la partition si simple d’un amour solide comme le roc autour duquel gravitent le monde et les désinences de ses émotions : la jeunesse, le conflit, et la difficile relation aux autres. Forcés de cohabiter chacun de leur côté quand l’un perd son travail, les deux amants fraichement mariés après 39 ans de vie commune réapprennent la vie et imposent avec douleur leur présence, eux qui ne désiraient rien d’autre que de se lover à l’écart du monde dans un New York très Woody style. Une belle phrase résume l’un des propos du film lorsque Lithgow explique au téléphone à son mari les conséquences de sa sa vie chez son neveu : « When you live with people, you know them better than you care to ». C’est bien là le regard du cinéaste, qui s’attache à gratter le vernis de la première séquence, cérémonie de mariage où l’on ne cesse d’affirmer un amour et un soutien qui ne peut tenir au sein de la vie quotidienne et de ses petites adversités. Particulièrement bien joué (Lithgow est décidément capable de tout, et Molina d’une très grande délicatesse lui aussi), le film a donc a priori tout pour lui pour renverser les cœurs. L’essai n’est pourtant pas pleinement convaincant. Parce que son recours à la musique est pesant, parce que sa démonstration est répétée à maintes reprises (nous avons vécu 39 ans ensemble, et du jour où nous nous sommes mariés, ironie tragique, méchant regard intolérant de la société, tout ça…) et que les ressorts de son scénario sont tout sauf crédibles, Molina vivant malgré lui dans une fête permanente alors qu’il ne souhaite que dormir, et rencontrant par le plus grand des hasards celui qui lui fournira un nouvel appart. Un brin long, peinant un peu dans ses tentatives de renouvellement des échanges, le film accuse un certain nombre de maladresses qui n’entachent pas pour autant sa sincérité ; et le final, assez surprenant, pourrait être considéré comme un coup de force supplémentaire pour nous tirer des larmes, mais fonctionne quant à lui plutôt bien. Love is strange, donc, et si le sujet, difficile à circonscrire, occasionne certaines maladresse, il n’en génère pas moins un film assez touchant. | |
| | | Zwaffle un mont de verres
Nombre de messages : 1724 Date d'inscription : 08/01/2014 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mar 23 Déc 2014 - 8:55 | |
| - Nulladies a écrit:
« When you live with people, you know them better than you care to »
Love is Strange porte bien son nom : traitant d’un sujet à la fois éculé et glissant, il avance en terrain miné. Raconter l’amour suppose un talent qui plane au-dessus des poncifs. Traiter de l’homosexualité du 3ème âge requiert du tact. On peut reconnaitre sans effort qu’Ira Sachs maitrise ces deux compétences. Cette histoire finalement très simple reprend la partition si simple d’un amour solide comme le roc autour duquel gravitent le monde et les désinences de ses émotions : la jeunesse, le conflit, et la difficile relation aux autres. Forcés de cohabiter chacun de leur côté quand l’un perd son travail, les deux amants fraichement mariés après 39 ans de vie commune réapprennent la vie et imposent avec douleur leur présence, eux qui ne désiraient rien d’autre que de se lover à l’écart du monde dans un New York très Woody style. Une belle phrase résume l’un des propos du film lorsque Lithgow explique au téléphone à son mari les conséquences de sa sa vie chez son neveu : « When you live with people, you know them better than you care to ». C’est bien là le regard du cinéaste, qui s’attache à gratter le vernis de la première séquence, cérémonie de mariage où l’on ne cesse d’affirmer un amour et un soutien qui ne peut tenir au sein de la vie quotidienne et de ses petites adversités. Particulièrement bien joué (Lithgow est décidément capable de tout, et Molina d’une très grande délicatesse lui aussi), le film a donc a priori tout pour lui pour renverser les cœurs. L’essai n’est pourtant pas pleinement convaincant. Parce que son recours à la musique est pesant, parce que sa démonstration est répétée à maintes reprises (nous avons vécu 39 ans ensemble, et du jour où nous nous sommes mariés, ironie tragique, méchant regard intolérant de la société, tout ça…) et que les ressorts de son scénario sont tout sauf crédibles, Molina vivant malgré lui dans une fête permanente alors qu’il ne souhaite que dormir, et rencontrant par le plus grand des hasards celui qui lui fournira un nouvel appart. Un brin long, peinant un peu dans ses tentatives de renouvellement des échanges, le film accuse un certain nombre de maladresses qui n’entachent pas pour autant sa sincérité ; et le final, assez surprenant, pourrait être considéré comme un coup de force supplémentaire pour nous tirer des larmes, mais fonctionne quant à lui plutôt bien. Love is strange, donc, et si le sujet, difficile à circonscrire, occasionne certaines maladresse, il n’en génère pas moins un film assez touchant.
je n'aurais pas dit mieux | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 3:21 | |
| Bon l’année est finie, c'est l'heure des tops et flops... désolé d'avance j'avais pris comme résolution d’arrêter les films intello chiants faute de temps et je m'y suis tenu. Le top : 1. Le vent se lève ( Miyazaki) 2. Enemy ( Villeneuve) 3. Le conte de la princesse Kaguya ( Takahata) 4. Gone Girl ( Fincher) 5. Interstellar ( Nolan) 6. 12 Years a Slave ( McQueen) 7. The Rover ( Michôd) 8. Patéma et le monde inversé ( Yoshiura) 9. The Homesman ( T.L. Jones) 10. Joe ( Green) 11. Juillet de sang ( Mickle) 12. Edge of Tomorrow ( Liman) 13. Minuscule - La vallée des fourmis perdues ( Szabo & Giraud) 14. Old Boy ( S. Lee) 15. La planète des singes: l'affrontement ( Reeves) La shitlist : -1. Les Gardiens de la Galaxie ( Gunn) : sous ses faux airs de blockbuster malin, un concentré de clichés pour space opera bas du front. 20 minutes à sauver au début et un peu de soul 70s pour faire passer la pilule sinon il passait derrière Transformers. -2. Transformers 4 : l'âge de l'extinction ( Bay) : The Island m'avait fait faire l'erreur d’espérer en Michael Bay. Une décennie et 4 Tranformers plus tard je me sens un peu con. -3. Under the Skin ( Glazer) : si j'avais su que c’était un film faussement intello et très chiant je me serais abstenu. -4. 3 Days to Kill ( McG) : je sais toujours pas ce qui m'a pris de mater ça. RIP Kevin Costner. -5. Godzilla ( Edwards) : un énorme gâchis de talent pour l'auteur britannique du très joli Monsters. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 7:52 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Bon l’année est finie, c'est l'heure des tops et flops... désolé d'avance j'avais pris comme résolution d’arrêter les films intello chiants faute de temps et je m'y suis tenu.
Le top :
1. Le vent se lève (Miyazaki) 2. Enemy (Villeneuve) 3. Le conte de la princesse Kaguya (Takahata) 4. Gone Girl (Fincher) 5. Interstellar (Nolan) 6. 12 Years a Slave (McQueen) 7. The Rover (Michôd) 8. Patéma et le monde inversé (Yoshiura) 9. The Homesman (T.L. Jones) 10. Joe (Green) 11. Juillet de sang (Mickle) 12. Edge of Tomorrow (Liman) 13. Minuscule - La vallée des fourmis perdues (Szabo & Giraud) 14. Old Boy (S. Lee) 15. La planète des singes: l'affrontement (Reeves)
La shitlist :
-1. Les Gardiens de la Galaxie (Gunn) : sous ses faux airs de blockbuster malin, un concentré de clichés pour space opera bas du front. 20 minutes à sauver au début et un peu de soul 70s pour faire passer la pilule sinon il passait derrière Transformers.
-2. Transformers 4 : l'âge de l'extinction (Bay) : The Island m'avait fait faire l'erreur d’espérer en Michael Bay. Une décennie et 4 Tranformers plus tard je me sens un peu con.
-3. Under the Skin (Glazer) : si j'avais su que c’était un film faussement intello et très chiant je me serais abstenu.
-4. 3 Days to Kill (McG) : je sais toujours pas ce qui m'a pris de mater ça. RIP Kevin Costner.
-5. Godzilla (Edwards) : un énorme gâchis de talent pour l'auteur britannique du très joli Monsters. J'attends encore d'en voir éventuellement un pour le mien, mais je retiens ceux que tu cites et que je n'ai pas vus : Patéma et le monde inversé, Joe (qui ne me donnait pas du tout envie, au vu du précédent du même réal), et Juillet de Sang. Sinon, on connait déjà nos désaccords... | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 7:57 | |
| « The Sun is God » Face au génie de Turner dont les toiles sont à elles seules des mondes s’affranchissant de toute parole (qu’on en prenne pour preuve le regard satirique posé sur les tentatives de Ruskin, critique imbu de sa personne, pour réduire son œuvre à une analyse rationnelle), le cinéaste se retrouve dans l’embarras. Un biopic conventionnel aurait tout d’un téléfilm à valeur documentaire, et ne laisser parler que la création conduirait vers des expérimentations laborieuses. Mike Leigh prend cette problématique à bras le corps, et c’est d’ailleurs par le corps qu’une grande partie de son traitement du sujet va passer. Crachant sur ses toiles, Turner incarné par Timothy Spall est plus proche de l’animal que du génie romantique habituel. Grognant en société comme en amour, incapable de tenir une famille ou de jouer le jeu du protocole, il vit pour sa toile, assisté de son père qui meurt à l’ouvrage. Peu explicite, le film fait se succéder les séquences où le peintre encaisse : les décès, la maladie, l’insuccès, avec un mélange d’acrimonie et d’indifférence, toujours plus attiré par le silence prolixe de la mer et des ciels habités par le soleil. De ce point de vue, Mike Leigh est assez proche du traitement âpre et beau que Pialat réservait à Van Gogh. Film peu sympathique, insistant sur la laideur ou la difformité des visages qui n’ont jamais peuplé les toiles du maitre, Mr Turner semble restituer le parcours d’un affranchissement de la compagnie des hommes vers le sublime de la nature qui s’affirme d’autant plus qu’elle s’affranchit de leur présence. Les débuts sont donc assez laborieux, et impliquent une adaptation du spectateur pour ce long récit (2h30) fragmenté où, peu à peu, vont se dessiner par touches irrégulières les conditions techniques de production, le rapport à l’Académie et à ses contemporains, et enfin son rapport émotionnel à son entourage. Tout cela pourrait se justifier sans néanmoins occulter un certain ennui et des questions quant à la pertinence de toutes les séquences, certaines semblant assez obscures, sinon anecdotiques. Mais ce serait sans compter sur le véritable intérêt du film, qui concentre toute l’ambition de Mike Leigh : le travail sur la photographie. Lorgnant très clairement du côté de Barry Lyndon, son esthétique est à couper le souffle. Puisqu’on a qualifié Turner de peintre de la lumière, le cinéaste va tenter de lui arriver à la cheville. Ne pouvant rivaliser avec les ciels orageux du peintre, c’est surtout dans les intérieurs qu’il va ouvrager l’entrée de la lumière, dans des plans qui rappellent Rembrandt ou De La Tour ; et les incursions dans la nature (les plaines herbeuses, les ports anglais, les falaises et les vagues) occasionnent la même fascination béate. Composés à la perfection, ces plans affirment non seulement la volonté d’honorer le prestigieux ancêtre du cinéma mais sont aussi le relai à l’impossible accès à la vérité de l’artiste par la seule biographie. | |
| | | Rorschach sourcilman ^^
Nombre de messages : 6953 Date d'inscription : 10/02/2009 Age : 43
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 9:23 | |
| The Rover a été un des gros flops de l'année au ciné en France pourtant, il avait été bien couvert niveau médiatique | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 9:40 | |
| - Rorschach a écrit:
- The Rover a été un des gros flops de l'année au ciné en France pourtant, il avait été bien couvert niveau médiatique
Pas étonnant, et puis quand on voit ce qui marche... |
| | | Rorschach sourcilman ^^
Nombre de messages : 6953 Date d'inscription : 10/02/2009 Age : 43
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 29 Déc 2014 - 9:42 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Rorschach a écrit:
- The Rover a été un des gros flops de l'année au ciné en France pourtant, il avait été bien couvert niveau médiatique
Pas étonnant, et puis quand on voit ce qui marche... ouai mais bon, ils avaient foutu qd même Pattinston dedans, question d'appâter la pucelle boutonneuse (expression façon arcanes du blockbuster ) | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mer 31 Déc 2014 - 6:17 | |
| - RabbitIYH a écrit:
1. Le vent se lève (Miyazaki) 2. Enemy (Villeneuve) 3. Le conte de la princesse Kaguya (Takahata) 4. Gone Girl (Fincher) 5. Interstellar (Nolan) 6. 12 Years a Slave (McQueen) 7. The Rover (Michôd) 8. Patéma et le monde inversé (Yoshiura) 9. The Homesman (T.L. Jones) 10. John Wick (Stahelski) 11. Joe (Green) 12. Juillet de sang (Mickle) 13. Edge of Tomorrow (Liman) 14. Minuscule - La vallée des fourmis perdues (Szabo & Giraud) 15. Old Boy (S. Lee)
Il me semblait bien que j'en avais oublié un. Meilleur film d'action ricain de série B depuis des lustres. The Equalizer de Fuqua avec un très bon Denzel Washington n’était pas mal non plus, plus orienté personnages qu'action par contre, et avec un peu trop de manichéisme et de bons sentiments pour faire le poids. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mer 31 Déc 2014 - 7:17 | |
| Travail, infamie, batterie Pour se laisser pleinement aller à la jubilation de Whiplash, il faut d’emblée lever une ambiguïté de taille : ce n’est pas un film sur la musique. Le mélomane qui ira chercher une exploration des subtilités de l’interprétation et une exploration de la symbiose au sein d’un jazz band en sera pour ses frais. Whiplash doit être vu comme un film sur le sport qui aurait cette qualité ultime de ne pas traiter du sport ; comme un film de guerre dont la finalité, panache suprême, ne serait pas la victoire sur l’adversaire, mais sur soi-même pour un dévouement à la performance artistique. A partir de là, on est prêt à tout accepter. La gestion du groupe par un instructeur dont les saillies cherchent clairement à rivaliser avec celles du Sergent Hartman dans Full Metal Jacket, les obstacles de plus en plus grandiloquents sur la voie de l’aspirant (course poursuite, épuisement, accident de voiture, sang sur les caisses), voire les incohérences (dont la stratégie finale du boss visant à humilier publiquement son poulain – et tout son groupe avec). Là n’est –presque – plus la question. De la même façon qu’un Raging Bull nous immergeait au point de rendre palpables les uppercuts, Whiplash vise à traduire visuellement la performance du batteur. Celui dont la mission est de donner la pulsation au groupe devient ici le centre de toutes les attentions. Les séquences réellement musicales, où l’ensemble joue, ont tout du clip de luxe : gros plans sur les instruments, montage léché, travelling en symbiose avec les cuivres, etc. Mais loin d’être à blâmer, cette esthétique fonctionne car elle décrypte la quête du chef, celui d’une perfection sonore et collective. Pour ce faire, c’est le making-of qui va devenir le réel sujet du film : comment on obtient le meilleur, et par quel moyen. La grande réussite de Whiplash réside dans cette alchimie et la construction extrêmement efficace de ces alternances entre art et performance. En plongeant tête baissée dans la répétition et l’exercice, jusqu’à la nausée, d’une mesure, en étirant jusqu’à l’absurde les exigences du tempo de l’instructeur, Damien Chazelle déconstruit autant la musique qu’il élabore un film à la tension aussi fascinante qu’oppressante. J.K. Simmons, impérial, n’est jamais aussi convaincant que lorsqu’il arrête une mesure pour en disséquer les imperfections. Le folklore qui se greffe sur sa gestion du groupe (séduction/humiliation/manipulation/galvanisation) est certes plaisant dans un scénario qui ne fait jamais de surplace, mais là n’est pas l’essentiel. De la même façon, les outrances sur la performance physique (sueur, sang, dilatation à l’extrême de la durée) sont moins à considérer comme des éléments crédibles qu’une volonté de faire corps avec la vibration, et de répercuter sur l’ouvrier la violence de la percussion. Il faut donc faire abstraction d’un certain nombre d’éléments pour se laisser pleinement prendre par Whiplash. Mais après tout, c’est bien là le sujet du film : lâcher prise et accepter le renoncement total à un schéma balisé (l’amour, les amis, la santé) pour devenir un être d’exception, c’est-à-dire un monstre. Assez immoral, le dénouement le dit clairement : le retour sur le devant de la scène du jeune meurtri bannit toute dimension morale et va puiser dans sa haine une performance qui n’a plus grand-chose à voir avec la musique, et surtout pas celle d’un ensemble : il joue comme on mitraille et quitte l’art pour une explosion qui n’a rien de la victoire finale sur le ring, mais serait plus à rapprocher du destin de Pyle à la fin de la première partie de Full Metal Jacket. Une jouissive, nihiliste et éclatante hybris, démonstration de force du jeune cinéaste Chazelle dont il nous tarde de voir les prochaines performances. | |
| | | moonriver Comme un Lego
Nombre de messages : 4790 Date d'inscription : 02/01/2014 Age : 54 Localisation : IDF
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mer 31 Déc 2014 - 10:58 | |
| Voilà ce que je retiens de mon année ciné durant laquelle j'ai raté pleins de films que je voulais absolument voir (Mommy, Gone Girl, Boyhood ....):
Bird People est sans contestation possible le film de l'année pour moi (voire des 5 dernières années). Ce film m'a beaucoup touché.
Je retiens aussi Grand Budapest Hotel, hyper jouissif et beau, le Saint Laurent de Bonello, Inside Llewyn Davis des frères Coen
J'ai bien kiffé Les Gardiens de La Galaxie ("je s'appelle Groot") et La Grande Aventure Lego.
et une mention spéciale à Jacky Au Royaume des Filles. | |
| | | bro' caquer, c'est si bon
Nombre de messages : 8585 Date d'inscription : 04/12/2008 Age : 46 Humeur : badine
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Mer 31 Déc 2014 - 19:00 | |
| Je retiens de mon année cinéma, les 2 seuls films que je suis allé voir :
* Un Eté à Osage County :
J'ai bien kiffé cette famille de cinglé(e)s, névrosées, psychopathes. Jouissive tension tout le long du film. Meryl Streep impressionnante en vieille peau.
* Le Loup de Wall Street :
M'a donné envie de gagner encore plus de fric et de me droguer (encore plus). | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Jeu 1 Jan 2015 - 9:29 | |
| Premiers pas sans la mafia. Le sentiment d’entrer dans un film puissamment classique nous happe dès les premières secondes de A most violent year. La photographie, la reconstitution du New York de l’aube des 80’s lorgne avec légitimité du côté de Lumet et distille ce grain jaunâtre dont il avait le secret. Tout au long du film, cette maitrise va se déployer, notamment dans un travail particulièrement méticuleux sur la lumière, les intérieurs d’une maison labyrinthique dont les nouveaux propriétaires peinent à devenir les occupants. L’intrigue est simple, et c’est avec la même apparente modestie que Chandor l’aborde : il s’agit d’atteindre, pour Abel, la nouvelle étape de son entreprise de transport de fioul en acquérant un gigantesque terrain, friche industrielle à l’image de l’état de la ville à cette époque, anarchique et décimée par la violence. L’autre référence assumée, celle du film de gangster va jouer avec la troublante ressemblance d’Oscar Isaac avec Al Pacino. Pas celui de Lumet, cette fois, plus généralement dans les marges, mais bien Le Parrain, tant dans la posture et la fermeté de traits décidés, à tout prix, à concrétiser son idéal capitaliste de fondation d’un empire. C’est là que les pistes se brouillent et que le film prend une tournure aussi intelligente qu’originale. Alors qu’on joue sur un terrain ultra codifié, Chandor brasse les références et déjoue les attentes balisées du spectateur. Abel clame son honnêteté, et son parcours vers la victoire est aussi celui du spectateur qui va devoir se convaincre de ses intentions. Le froid contrôle avec laquelle il dirige ses commerciaux, traite avec ses rivaux, est d’autant plus captivant qu’il dévoile progressivement un homme acculé à jouer dans la cour des corrompus. A most violent year pourrait ainsi être vu comme le négatif des Affranchis : « j’ai toujours voulu y arriver sans être un gangster ». Pas de faste, pas de clinquant, et surtout pas d’argent facile. Car celui qui provient du crime est souillé à tout point de vue : par les armes, par les enquêtes, et entache la réputation du self made man idéal. Construit avec une habileté qu’on trouvait déjà dans Margin Call, le montage alterne les différents éléments qui encerclent Abel. La loi, les concurrents, les syndicats : tous épuisés par cette année d’une violence inouïe, poussent l’entrepreneur à appliquer leurs règles du jeu. L’autre belle idée est celle du relai de la dimension intime, par le personnage de l’épouse, Jessica Chastain en lady Macbeth d’un glamour polaire. La tragédie, écrite sur le fil, est d’une efficacité redoutable, et évite la quasi-totalité des pièges de ce type de film. On retrouve ici la maitrise et l’épaisseur des personnages des films de James Gray comme The Yards, et un talent indéniable pour tisser les fils retors d’un homme en prise avec son temps. Et, cerise sur le gâteau, c’est du côté de Friedkin que Chandor construit sa séquence de poursuite, parfaitement insérée dans la dynamique du film, longue et imparable, démonstration de force sur un parcours entre tunnels, voies ferrées et métro. Aussi intelligent dans son déroulement que par les ambiguïtés satiriques de son dénouement, (à une réserve près, celle d’un symbolisme un brin appuyé, mêlant le pétrole et le sang) A Most Violent Year est exemplaire de maitrise ; la probité complexe de son personnage, la malice avec laquelle il joue des codes pour les asservir à un parcours d’une grande subtilité nous force à reconnaitre que Chandor joue désormais très clairement dans la cour des grands. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Jeu 1 Jan 2015 - 11:41 | |
| Ça donne envie ça ! D'autant que j'avais beaucoup aimé Margin Call. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Jeu 1 Jan 2015 - 18:31 | |
| Tu as vu All is Lost, il me semble. C'est dispensable, non ? | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Ven 2 Jan 2015 - 0:36 | |
| Non je voulais mais pas vu ! Mais j’étais quand même moins tenté que par celui-ci. |
| | | Otto Bahnkaltenschnitzel génération grenat (dîne)
Nombre de messages : 1940 Date d'inscription : 27/08/2014
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Sam 3 Jan 2015 - 21:18 | |
| Magnifique de partout! | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Jeu 8 Jan 2015 - 7:05 | |
| Full Metane Alchimist Dans le genre de l’épate et de la pose, Hard Day en impose d’emblée. Belle ouverture, cadres impeccables, esthétique brillante tout droit sortie des pubs pour voitures de prestige, le film joue la carte de la maitrise alliée à un rythme en cut assez rapide, qui nous promet un rock’n roll chromé de très bonne facture. L’intrigue, au départ assez convenue, mêle rapidement un nouvel ingrédient qui fait lui aussi mouche, l’humour, voire le franc comique. La scène où le protagoniste s’organise pour planquer le corps dans le cercueil de sa mère est ainsi jubilatoirement construite, mix de MacGyver et de mission impossible, le tout empêtré dans une atmosphère résolument comique. Seong-hoon Kim multiplie les plongées et sait indéniablement filmer la ville, et son scénario va ensuite se complexifier considérablement. Il est assez saisissant de voir à quel point le film de nourrit, sur ce point et bien d’autres, de l’esthétique de la série. Twists comme autant de cliffhangers de fin d’épisode toutes les 20 minutes, caméra à l’épaule et technologie constante au service de l’enquête à la 24 Heures, et même, au centre du film, un «rêve » du personnage principal qui a vraiment tout du « Previously on Hard Day »… tout nous renvoie sans cesse à cet univers calibré. Certes, l’humour noir et loufoque est censé apporter sa singularité, mais c’est justement là que le bât blesse. Là où des cinéastes comme Bong Joon-Ho, Park Chan-Wook voire Tarantino, savent parfaitement distiller le mélange entre intrigue, comique et gravité, Seong-hoon Kim se vautre volontairement dans la bouffonnade la plus pure, et délaisse au bout d’un moment l’intérêt qu’on pouvait prêter à son intrigue ou ses personnages. Lorgnant clairement vers le cartoon, les combats interminables, les retours en série, sont certes l’occasion d’une poursuite dans l’inventivité visuelle, mais fatiguent un brin et hystérisent à outrance des figures qui étaient pourtant assez bien croquées au départ : un flic ripoux qu’on nous force à apprécier, un bad guy machiavélique qui deviennent deux pantins dénués d’épaisseur. Le mélange des genres est une alchimie délicate. On ne peut pas dire qu’elle réussisse à Hard Day, qui affirme clairement un savoir-faire, mais qui pêche dans sa cohérence d’ensemble. | |
| | | moonriver Comme un Lego
Nombre de messages : 4790 Date d'inscription : 02/01/2014 Age : 54 Localisation : IDF
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Jeu 8 Jan 2015 - 17:48 | |
| - Nulladies a écrit:
Homme libre, toujours tu chériras ta mère
Il est difficile d’éviter les parallèles qui se dessinent dès le début du film entre le personnage de Steve et la stature du cinéaste Dolan. A l’image de Diane, le spectateur se trouve forcer de cohabiter avec une forte personnalité, qui impose ses codes fougueux et exige que l’autre s’adapte. L’imagerie échevelée d’un ado instable a de quoi irriter dans un premier temps. Clip oscillant entre la pop sucrée assumée (Dido…) et une musique proche des ambiances de Sigur Ros, le tout sur une imagerie low-fi des suburbs canadiennes et jaunie par un soleil néanmoins poétique sur ces trajectoires libertaires en caddie ou longboard… Dans la droite lignée de States of Grace, on est tentés de décliner, surtout lorsqu’on sait qu’on s’engage dans un film de 2h20.
Dingo, libre dans sa tête.
A croire qu’il le faisait volontairement pour mieux nous conquérir par la suite, Dolan opère un changement de point de vue par l’irruption du personnage de Kyla, voisine mutique, puis bègue, qui s’épanouira au contact de frappadingues comme une fleur fragile. « Accroche ta ceinture, on va décoller », prévient Diane quand Steve met la compile du père décédé. Programme audacieux, mais qui emporte tout : il fallait quand même un sacré culot pour m’émouvoir avec du Céline Dion. Dès lors, le trio formé nous entraine à sa suite, et le travail en tous points exceptionnel des acteurs permet une chevauchée sur les montagnes russes du pathos : la vulgarité qui touche, le rejet d’un monde conventionnel, et les crises qui brisent un temps l’harmonie pour rappeler sa précarité. Celle qui oppose Kyla à Steve, lorsqu’il la provoque et arrache son collier, est l’un des très grands moments du film, et pose l’une de ses petites limites : à trop vouloir jouer au yoyo avec leur destin et les émotions de l’audience, la répétition guette, ainsi que l’affadissement, que Dolan a tendance à conjurer par une certaine surenchère (comme la scène de karaoké ou du supermarché, par exemple).
Vol au-dessus d’un nid de casse-cou(ille)s.
Mommy est une bombe émotionnelle ; à prendre ou à laisser, mais s’y exposer implique qu’on en accepte les dommages collatéraux. Excessif, jeune et fougueux, il ne fait pas de concessions. On peut ergoter sur les passages en force, comme ce carton initial sur la loi de 2015, gage de « crédibilité » assurant les rails vers le dénouement, ou le jeu sur les formats. Le 1/1 fonctionne assez bien pour oppresser, et l’élargissement fonctionne la première fois, même si le fait qu’il le soit par les mains du protagoniste manque tout de même de subtilité. Il en est de même pour les caméras portées et les champs/contre champs sans cut.
Quand on a que l’humour
Il reste cette alchimie imparable, la grâce avec laquelle Dolan sait orchestrer l’humain, une langue phénoménale, d’autant plus humaine qu’elle est argotique. Portraitiste hors pair des femmes, doté d’une tendresse infinie pour son protagoniste, Dolan creuse un sillon qui est le sien, se débarrassant des motifs extérieurs (du sexe ou du polar) pour plonger tête baissée dans les soubresauts d’une humanité fragile.
La came isole.
[Spoilers] « L’amour n’a rien à voir là-dedans, malheureusement », annonce une responsable du centre au début du film. Démenti lucide à cette malédiction initiale, Mommy hurle, mais sait aussi s’épanouir avec une maturité impressionnante, à l’image de l’échange final entre les deux femmes : composant avec les non-dits, et la prise de conscience que la parenthèse enchantée s’achève, le film se teinte alors d’une mélancolie qui nous a fait accéder au triste monde des adultes arrachés aux fulgurances de la jeunesse désormais anesthésiée par les calmants.
Enfin vu, beaucoup aimé. Des défauts mais un vrai cinéaste qui nous emporte. C'est le premier film de lui que je vois. Je suis emballé. Comme Zwaffle, ma femme n'a remarqué les changements de format qu'à la fin du film .... | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Dim 18 Jan 2015 - 6:44 | |
| Fatal yakusa Qu’il traite des samouraïs ou des yakusas, Gosha ne semble pas dévier d’une vision du monde résolument pessimiste. A chaque fois, il s’agit d’isoler dans la foule des serviteurs d’un ordre, noble ou criminel, des hommes d’honneur qui voient leur idéaux se fracasser sur l’autel des compromissions et du pouvoir tentaculaire. Manipulation, mensonges, accointances entre le syndicat du crime et le pouvoir étatique composent cette nouvelle partition d’une symphonie noire. Si le film évolue par rapport à Hitokiri ou Les trois samouraïs hors-la-loi, c’est dans un traitement plus radical encore de l’image, Gosha accentuant l’emphase de certaines séquences, au mépris, parfois du rythme général. Verbeux et laborieux dans l’établissement de sa situation initiale, le film s’ouvrait pourtant sur des scènes muettes assez saisissantes pour présenter les protagonistes à leur sortie de prison, et la mise à mort de certains d’entre eux, ainsi qu’une séquence d’amour comme seuls les japonais savent en créer, mélange troublant d’érotisme, de violence et de larmes. Enchevêtrant des discussions à rallonge pour aboutir à une intrigue finalement très conventionnelle, le film est trop long pour pleinement convaincre. Il n’en demeure pas moins assez passionnant dans l’éclairage qu’il propose sur l’éternelle tragédie de l’homme face à la faiblesse cruelle de ses pairs. Deux éléments essentiels contribuent à marquer les esprits. La musique, tout d’abord, véritable protagoniste du film, souvent intradiégétique, écrin pour les scènes de combats ou d’assassinat. Tout le récit converge vers une fête qui doit célébrer la concorde entre deux clans, notamment par un mariage arrangé, et brisant bien entendu le cœur de ceux qui s’aiment sincèrement. Le défilé, lancinant, accompagne de façon quasi hypnotique tout le dernier quart du film, le rythme des percussions devenant un signe de victoire puis de défaite. Dans les scènes les plus violentes, où les combats sont dilatés à l’extrême, la musique prend souvent le pas sur la bande son, reléguant au second plan les corps mutilés dans un contrepoint troublant, à la fois esthétique et profondément désespéré. Il n’est pas innocent que le décor majeur des Loups soit cette plage sur laquelle plusieurs épaves échouées ne cessent de mourir au gré du ressac : Gosha fait subir le même traitement à la majorité de ses personnages. Le deuxième élément est le rôle assigné à la femme, qui prend une importance capitale. Le personnage de la tueuse à l’ombrelle, notamment, supplante quasiment tous les yakusas et chefs de clans, dans son mutisme méthodique et implacable. La plus belle scène du film, le meurtre d’un homme par celle-ci et sa comparse, occasionne un trio amoureux où éros et thanatos se mêlent dans une osmose parfaite, souligné par un traitement du rythme et de la musique qui en font une séquence en tous points virtuose. Le lent crescendo, cette chorégraphie déraisonnable des corps ensanglantés et de la fin de tout ordre moral finissent par éclipser les débuts pesants du film, et confirment le talent singulier de Gosha, qui fait infuser sur le XXème siècle la noirceur qu’on circonscrivait jusqu’alors au passé fondateur du pays. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 19 Jan 2015 - 1:54 | |
| Jamais rien vu de ce Gosha ! |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 19 Jan 2015 - 5:42 | |
| Il me manque Goyokin dans ses plus connus, mais je te recommande vivement 3 samouraïs hors-la-loi, critique à venir...(mais pas pour tout de suite). | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 19 Jan 2015 - 6:37 | |
| Vers Gravity mais en deçà. La crainte est légitime : Disney ayant dévoré Marvel, le voir intégrer à ses propres films d’animation la franchise peut faire redouter le pire. Des chansons chez les super héros, des cupcakes de l’espace et de la guimauve en 3D, tout ça. De tout cela, nulle trace. Il est évident que le géant de l’entertainment a su tirer les leçons du succès croissant de ses concurrents, Pixar, bien sûr, mais surtout Dreamworks. Les nouveaux héros est un film léché, assez parfait dans son animation, et qui sait tirer parti de tout ce que la technologie ne cesse d’accroitre ces dernières années. La ville, mix assez sympathique de San Francisco et Tokyo, est particulièrement attrayante et les séquences de voltige au-dessus d’elle figurent parmi les morceaux de bravoure du film. Le monde parallèle final occasionne lui aussi des expériences visuelles vraiment réussies, et donne enfin un peu de sens à la 3D. Comme dans toute introduction de ce qui deviendra à n’en point douter une franchise, la genèse des héros fait tout le sel du récit. Celle-ci fonctionne pleinement dans la découverte du fameux robot Bibendum Baymax, dont le potentiel comique est bien exploité, gros dadais aussi maladroit qu’efficace. La suite, malheureusement, passe sous le rouleau compresseur des attendus archétypaux, avec cette idée toujours en vigueur qu’il faut à tout prix digérer et redistribuer ce qui a marché ailleurs. La bande de personnages qui se constitue particulièrement dénuée d’âme, n’est qu’un support à des inventions technoïdes certes amusantes sur le plan graphique, mais galvaudées, remix des 4 fantastiques à la sauce teenage. Le catalogue des emprunts est impressionnant : Un méchant qui répand une matière noire protéiforme (Les cinq légendes, Lucy), un jeune garçon qui doit découvrir un nouveau compagnon (Dragons, en moins bien), apprendre à voler en lui créant un harnais (Dragons, en aussi beau visuellement), mais risque de le voir se transformer en méchant (Dragons 2), un personnage qui ne comprend pas les métaphores (Les Gardiens de la Galaxie), une course en apesanteur parmi des débris en 3D (Gravity), et des portes vers des univers parallèles (Stargate)… Bien entendu, c’est bien là la loi du genre que de se recycler à l’infini au fil des modes. Mais autant la franchise Dragons apporte ce petit supplément d’âme qui lui donne un véritable cachet, autant cet opus tient peu la distance dans la caractérisation des personnages, voire le script lui-même, relativement bâclé. On peut tout de même considérer Les nouveaux héros comme une assez bonne nouvelle dans la galaxie Disney : le studio s’adapte à son époque et sait comment exploiter les milliards dont il dispose pour une animation digne de son nom. Reste à engager de véritables scénaristes qui ne soient pas inféodés aux lois du marché pour pleinement satisfaire le spectateur un brin blasé de ces sempiternelles formules. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... Lun 19 Jan 2015 - 7:34 | |
| En-deçà de Gravity équivaudrait à très mauvais pour moi, mais je suis quand même bien tenté ! |
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| Sujet: Re: Voyage en salle obscure... | |
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| | | | Voyage en salle obscure... | |
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