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| En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... | |
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Auteur | Message |
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Otto Bahnkaltenschnitzel génération grenat (dîne)
Nombre de messages : 1940 Date d'inscription : 27/08/2014
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 11 Mai 2015 - 18:27 | |
| - Esther a écrit:
Vu au cinoche la première fois : Magnifique. Revu en DVD 10 ans plus tard : Bof. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 6:20 | |
| - Otto Bahnkaltenschnitzel a écrit:
- Esther a écrit:
Vu au cinoche la première fois : Magnifique. Revu en DVD 10 ans plus tard : Bof.
Pareil pour la première... et c'est pour ça que j'ose pas trop le revoir. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 6:22 | |
| Nanard laqué Les détracteurs de De Palma y verront une victoire : revoir son dernier film ne lui fait pas du bien. La première partie, laborieuse, semble avoir pour unique objectif de remettre en place le cadre des anciennes amours du cinéaste : rutilance eighties, fascination pour le luxe, érotisme compassé. Une idée pointe, celle d’une auto-parodie satirique, tant tout cela sonne faux et cheap. Car au-delà de l’imagerie, les thèmes eux-mêmes sont éculés : la publicité, la manipulation, les mensonges, soit le back catalogue de Palmien. Certes, tout cela est très bien filmé, et ne cesse de jouer avec les codes pour montrer à quel point le maitre à bord n’est pas dupe des artifices qu’il manipule. Cadrages carcéraux, intérieurs cossus et étouffants dans leur épure laquée, permanence du voyeurisme et de la surveillance des écrans contaminent progressivement le récit. Les comédiennes, assez irritantes, la blonde executive woman et la brune fausse victime, ont tout d’une pâle copie des couples iconiques du cinéma, Mulholland Drive en tête. Mais là aussi, l’ironie semble assumée, et De Palma prend un malin plaisir à faire de ses poupées des marionnettes dociles… Reste à savoir à quel profit. A mesure que l’intrigue progresse, le cinéaste abat ses cartes. Loin des contraintes imposées par les grands studios, financé par une Europe acquise à sa cause d’auteur, il laisse libre cours à ses fantasmes et sa quête d’une beauté formelle. Comme dans Femme Fatale, qui s’ouvrait sur une séquence maitresse, les circonvolutions du polar ne sont qu’un prétexte à une exploration de l’image et ses fantasmes. La séquence en split-screen et les multiples retournements oniriques du final sont le véritable terrain de jeu obsessionnel du cinéaste, auquel il revient sans cesse, et avec une maitrise unique. Tout amateur de son cinéma y trouvera son compte, mais ayons la lucidité de reconnaitre que l’emballage pour y parvenir est de plus en plus léger, voire transparent. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 6:24 | |
| Parcours par chœurs. Du premier au dernier plan, Elephant s’impose comme une étrange mécanique, un objet hybride qui prend le parti de nous emmener hors des sentiers battus et de fouler au pied les attentes dont il peut faire l’objet au regard du sujet qu’il traite. Tout, dans ce récit, n’est que trajet. De celui des nuages filant au-dessus d’un poteau électrique dans le très beau plan initial aux zigzags chaotiques de la voiture paternelle dans la première séquence, Gus Van Sant semble se contenter de suivre les parcours de ses personnages convergeant vers la catastrophe. Rivés aux nuques, s’enfonçant dans le dédale d’une structure inhumaine par sa démesure, le cinéaste propose une radiographie presque désincarnée d’individus qui se croisent dans une atonie générale trop artificielle pour être involontaire. Cette dilatation du temps, où l’action réelle des conversations ou des interactions est supplantée par les déplacements solitaires et sans parole, soulignée par la musique de Beethoven génère une mélancolie qui sera l’une des forces du film. Instants suspendus et insignifiants, polyphonie spatiale permettant de revoir la même séquence du point de vue de personnages différents, sans qu’elles servent réellement le sens du récit, se déploient en une poésie visuelle d’autant plus délicate et fragile qu’on sait l’imminence de la tuerie en ces lieux trop paisibles. Au dehors, la très belle photographie, incarnée par le personnage d’Elias braquant son appareil au hasard des rencontres, capte la lumière automnale avec une grâce imparable. Non chronologique, c’est lorsqu’il tente d’insuffler les dissonances que le film perd de sa grâce aérienne. Si les brimades en off dont fait l’objet Michelle sont assez pertinentes, le portrait fait des ados tueurs est plus maladroit, démonstratif là où la distance humble permettait une empathie étrange avec les victimes. Expérience atypique, Elephant surprend comme il trébuche, et son violent final fait mouche parce qu’il semble épouser l’état d’esprit de ses instigateurs, anesthésiés et sans réelle prise de conscience. Si le film peut se perdre par instant dans les errances dont il se veut le guide muet, il n’en reste pas moins un parcours de spectateur assez marquant. | |
| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 6:45 | |
| Vu ça hier soir à la télé. j'étais lessivé, pas envie de chercher le film compliqué. Verdict: A chier, du début à la fin. Vraiment très mauvais. Je suis même pas allé à la fin. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 7:44 | |
| - Nulladies a écrit:
Nanard laqué
Les détracteurs de De Palma y verront une victoire : revoir son dernier film ne lui fait pas du bien. La première partie, laborieuse, semble avoir pour unique objectif de remettre en place le cadre des anciennes amours du cinéaste : rutilance eighties, fascination pour le luxe, érotisme compassé. Une idée pointe, celle d’une auto-parodie satirique, tant tout cela sonne faux et cheap. Car au-delà de l’imagerie, les thèmes eux-mêmes sont éculés : la publicité, la manipulation, les mensonges, soit le back catalogue de Palmien. Certes, tout cela est très bien filmé, et ne cesse de jouer avec les codes pour montrer à quel point le maitre à bord n’est pas dupe des artifices qu’il manipule. Cadrages carcéraux, intérieurs cossus et étouffants dans leur épure laquée, permanence du voyeurisme et de la surveillance des écrans contaminent progressivement le récit. Les comédiennes, assez irritantes, la blonde executive woman et la brune fausse victime, ont tout d’une pâle copie des couples iconiques du cinéma, Mulholland Drive en tête. Mais là aussi, l’ironie semble assumée, et De Palma prend un malin plaisir à faire de ses poupées des marionnettes dociles… Reste à savoir à quel profit. A mesure que l’intrigue progresse, le cinéaste abat ses cartes. Loin des contraintes imposées par les grands studios, financé par une Europe acquise à sa cause d’auteur, il laisse libre cours à ses fantasmes et sa quête d’une beauté formelle. Comme dans Femme Fatale, qui s’ouvrait sur une séquence maitresse, les circonvolutions du polar ne sont qu’un prétexte à une exploration de l’image et ses fantasmes. La séquence en split-screen et les multiples retournements oniriques du final sont le véritable terrain de jeu obsessionnel du cinéaste, auquel il revient sans cesse, et avec une maitrise unique. Tout amateur de son cinéma y trouvera son compte, mais ayons la lucidité de reconnaitre que l’emballage pour y parvenir est de plus en plus léger, voire transparent. Totalement d'accord avec ta critique sur ce coup-là. Top trois des De Palma les plus dispensables à mon sens, ce qui n'en fait pas pour autant un ratage complet. - Nulladies a écrit:
Parcours par chœurs.
Du premier au dernier plan, Elephant s’impose comme une étrange mécanique, un objet hybride qui prend le parti de nous emmener hors des sentiers battus et de fouler au pied les attentes dont il peut faire l’objet au regard du sujet qu’il traite. Tout, dans ce récit, n’est que trajet. De celui des nuages filant au-dessus d’un poteau électrique dans le très beau plan initial aux zigzags chaotiques de la voiture paternelle dans la première séquence, Gus Van Sant semble se contenter de suivre les parcours de ses personnages convergeant vers la catastrophe. Rivés aux nuques, s’enfonçant dans le dédale d’une structure inhumaine par sa démesure, le cinéaste propose une radiographie presque désincarnée d’individus qui se croisent dans une atonie générale trop artificielle pour être involontaire. Cette dilatation du temps, où l’action réelle des conversations ou des interactions est supplantée par les déplacements solitaires et sans parole, soulignée par la musique de Beethoven génère une mélancolie qui sera l’une des forces du film. Instants suspendus et insignifiants, polyphonie spatiale permettant de revoir la même séquence du point de vue de personnages différents, sans qu’elles servent réellement le sens du récit, se déploient en une poésie visuelle d’autant plus délicate et fragile qu’on sait l’imminence de la tuerie en ces lieux trop paisibles. Au dehors, la très belle photographie, incarnée par le personnage d’Elias braquant son appareil au hasard des rencontres, capte la lumière automnale avec une grâce imparable. Non chronologique, c’est lorsqu’il tente d’insuffler les dissonances que le film perd de sa grâce aérienne. Si les brimades en off dont fait l’objet Michelle sont assez pertinentes, le portrait fait des ados tueurs est plus maladroit, démonstratif là où la distance humble permettait une empathie étrange avec les victimes.
Expérience atypique, Elephant surprend comme il trébuche, et son violent final fait mouche parce qu’il semble épouser l’état d’esprit de ses instigateurs, anesthésiés et sans réelle prise de conscience. Si le film peut se perdre par instant dans les errances dont il se veut le guide muet, il n’en reste pas moins un parcours de spectateur assez marquant. Là par contre un peu moins raccord, comme Gerry c'est pour moi un chef-d’œuvre d'abstraction mais pas que. Certes la description des tueurs accros aux jeux de shoot sur console n'est pas forcement très subtile bien qu'elle ait le mérite d’être véridique. Mais la scène est de peu d'importance au regard de ce ballet en flottement où se mêlent la fascination de Van Sant pour les éphèbes adolescents et cette empathie tragique pour une jeunesse sans repère (cf. les dialogues du blondinet avec son père) ni avenir, symbolisées par les dernières heures de ces morts en sursis et ce microcosme prônant l’artificialité où ceux qui n'ont pas l'apparence pour eux n'ont plus que la violence pour sortir du lot. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 7:58 | |
| Il faut absolument que je voie Gerry, depuis le temps... | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 9:03 | |
| C'est clairement celui qui divise le plus dans sa filmo, mais il faut dire qu'il y va fort sur la lenteur de l' "action" et le minimaliste du "scénario"... |
| | | Zwaffle un mont de verres
Nombre de messages : 1724 Date d'inscription : 08/01/2014 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 9:37 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- C'est clairement celui qui divise le plus dans sa filmo, mais il faut dire qu'il y va fort sur la lenteur de l' "action" et le minimaliste du "scénario"...
de loin un de mes préférés du sieur Van Sant, c'est une expérience mais une expérience forte | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 13:13 | |
| Ben oui, dans mon top trois aussi avec Drugstore Cowboy et Elephant. Mais en général on adore ou on déteste. |
| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 12 Mai 2015 - 13:49 | |
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| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 13 Mai 2015 - 9:50 | |
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| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 18 Mai 2015 - 11:44 | |
| Ca aurait pu être pas mal... Mais la fin aux relents patriotiques à la con gâchent l'ensemble, je trouve. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 18 Mai 2015 - 13:57 | |
| Bof, c'est plus humaniste que patriotique, je trouve. Beau film, me concernant. |
| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 18 Mai 2015 - 14:00 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Bof, c'est plus humaniste que patriotique, je trouve. Beau film, me concernant.
Je parle des cinq dernières minutes. Mais bon, dans l'ensemble, c'était pas mal quand même. | |
| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 18 Mai 2015 - 14:18 | |
| Je me suis fait ça ce matin. Enfin, vers 4h. Les insomnies, ça permet au moins de se refaire des classiques. | |
| | | Esther Yul le grincheux
Nombre de messages : 6224 Date d'inscription : 31/10/2013 Age : 50 Humeur : Taquine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 20 Mai 2015 - 14:16 | |
| Revu hier soir. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 21 Mai 2015 - 7:00 | |
| …and cowardice for all. Série B assumée, L’invasion des profanateurs de sépulture sait tirer parti de toutes ses limites : son économie de moyen se met au service d’une tonalité tendue et d’une atmosphère qui, sans s’embourber dans les excès de l’horreur ou de la science-fiction, distille une paranoïa qui fera les grandes heures de films ou séries à venir, comme Les Envahisseurs. Car l’originalité du film tient dans son exploitation du motif de l’invasion : silencieuse, dans l’indifférence généralisée, sans grand spectacle, elle se fait insidieusement en coulisses. Enfants, femmes et médecin sont les seuls initiés à constater la propagation du mal, comme si seule leur empathie pouvait encore garantir un regard sur la vérité. Sur ce motif s’ajoute l’argumentaire proposé par les envahisseurs et la façon dont il contamine l’histoire d’amour entre les protagonistes : un éloge de l’ablation des sentiments, une vie mécanique où tout serait simple, car dénué de souffrance. Certes, les parallèles à faire avec la peur du communisme, qu’on retrouve aussi dans La chose venue d’un autre monde cinq ans plus tôt, sont une grille de lecture possible, notamment dans cet effroi d’une société où l’individu se fondrait dans une masse indifférenciée. Mais c’est aussi l’organisation industrielle (voire capitaliste ?) de l’invasion, par les graines, les camions, le fait que l’abandon au repos et au sommeil soit la voie de la capitulation qui dessine une dénonciation autrement plus subtile. En 1956, Don Siegel n’est pas encore en pleine possession de ses moyens. On est loin de la hargne qu’on trouvera plus tard dans des brûlots comme Dirty Harry, A bout portant ou Les Proies. Mais le fait que le studio lui ait imposé cette structure en flashback et le refus d’une fin pessimiste en dit long sur son projet initial, finalement plus proche d’un Ionesco et son Rhinocéros que d’une banale série B. [infos=][/infos] | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 21 Mai 2015 - 7:51 | |
| Yep, pour moi ça reste d'ailleurs son meilleur film... et la meilleure version. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 23 Mai 2015 - 8:41 | |
| Larmes de séduction massive. Suivre Chihiro dans son voyage est l’occasion d’un rite initiatique qui aura autant d’incidence sur la jeune fille que le spectateur. Chef-d’œuvre de l’animation, le film de Miyazaki est de ceux qui traversent les âges et les modes, se distinguent par une profonde singularité d’écriture et une splendeur visuelle intouchable. Entrer dans cet univers, c’est accéder à l’invisible. Le monde des esprits, fantasme absolu et vivier à merveilles, n’est pourtant pas d’un accès facile. C’est là la première originalité du récit : parce qu’ils interagissent avec ce monde, parce qu’ils le considèrent comme un parc d’attraction, les parents de Chihiro y deviennent un bien de consommation. Et l’incursion de leur fille dans cet univers se fera à l’inverse de la contemplation béate : il s’agira de travailler, de souffrir, de perdre un temps son nom, le chemin du retour, dans un monde aussi fascinant qu’effrayant. Parce que le monde des esprits, contrairement à la représentation éthérée qu’on serait tenté d’en avoir, est tout sauf immatériel. Les bains, les banquets, la soif de l’or, occasionnent un univers fébrile et laborieux, entièrement rivé à la matière. On frotte, on lave, on ingère, et l’on compose avec cette tentation constante de l’excès. Chez Miyazaki, les êtres sont versatiles, détenteurs de sagesse profonde et faillibles, en proie à leurs passions et maitres à penser, adjuvants et opposants. Ils contiennent, à l’image du Sans-Visage, toute la sérénité silencieuse du monde et vomissent ensuite avec fracas les débordements de leur comportement. Dans ce monde instable, la quête est celle de l’identité : transformés, ou dépossédés de leur nom véritable, les personnages (Chihiro, ses parents, Haku, les créatures qui entourent Yubaba, elle-même et sa sœur jumelle) cherchent à définir leur place, leur rôle et leur mission, et se laissent porter par les circonvolutions d’un univers en constante fluctuation, parfaitement métaphorisé par ces volutes de vapeur parfumées qui finissent par révéler la pureté originelle des êtres. La fascination de ces thématiques n’a d’égale que celle provoquée par l’univers graphique qui se déploie. Sans limite dans son inventivité, le monde des esprits, convoque des araignées à charbon, des vieux bougons à bras multiples, des lampadaires unijambistes et des têtes sautillantes. Visuellement, le travail sur les décors est un enchantement continu, de ces parois florales inoubliables à l’architecture, entièrement construite sur la profondeur, érigeant une cité radieuse encerclée par un ciel océanique, terrain d’exploration de plus en plus vaste. Car la dynamique, avant le retour au monde réel, est bien celle de l’affranchissement. De l’asservissement, d’un mauvais sort, d’une carapace, d’une enveloppe corporelle. De l’ignorance et de l’oubli, aussi, toutes ces thématiques concentrées dans la séquence la plus forte du film, celle de la reconnaissance entre Chihiro et Kohaku. Instant suspendu, coup de foudre et retour de la mémoire, il résume la délicatesse infinie de ce film qui parvient à émouvoir en mêlant des mouvements contradictoires : la dissolution par les larmes et les écailles qui sèment un sillage émotionnel dans le ciel, l’acquisition de la connaissance du retour de la mémoire. L’émotion et la sagesse. L’initiation et l’adieu. Terrassé par cette beauté, déconcerté par cette magie, le spectateur / accompagnateur de Chihiro aura découvert à sa suite sa part d’invisible en lui, ce monde mystérieux et complexe des esprits où se mêlent, en musique et sur les plus sublimes images qui soient, l’indicible de sa nature profonde, qui ne demande qu’à être explorée à nouveau. | |
| | | Azbinebrozer personne âgée
Nombre de messages : 2751 Date d'inscription : 12/03/2013 Age : 63 Localisation : Teuteuil Humeur : mondaine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 23 Mai 2015 - 11:16 | |
| - Nulladies a écrit:
Larmes de séduction massive.
Suivre Chihiro dans son voyage est l’occasion d’un rite initiatique qui aura autant d’incidence sur la jeune fille que le spectateur. Chef-d’œuvre de l’animation, le film de Miyazaki est de ceux qui traversent les âges et les modes, se distinguent par une profonde singularité d’écriture et une splendeur visuelle intouchable.
Entrer dans cet univers, c’est accéder à l’invisible. Le monde des esprits, fantasme absolu et vivier à merveilles, n’est pourtant pas d’un accès facile. C’est là la première originalité du récit : parce qu’ils interagissent avec ce monde, parce qu’ils le considèrent comme un parc d’attraction, les parents de Chihiro y deviennent un bien de consommation. Et l’incursion de leur fille dans cet univers se fera à l’inverse de la contemplation béate : il s’agira de travailler, de souffrir, de perdre un temps son nom, le chemin du retour, dans un monde aussi fascinant qu’effrayant.
Parce que le monde des esprits, contrairement à la représentation éthérée qu’on serait tenté d’en avoir, est tout sauf immatériel. Les bains, les banquets, la soif de l’or, occasionnent un univers fébrile et laborieux, entièrement rivé à la matière. On frotte, on lave, on ingère, et l’on compose avec cette tentation constante de l’excès. Chez Miyazaki, les êtres sont versatiles, détenteurs de sagesse profonde et faillibles, en proie à leurs passions et maitres à penser, adjuvants et opposants. Ils contiennent, à l’image du Sans-Visage, toute la sérénité silencieuse du monde et vomissent ensuite avec fracas les débordements de leur comportement. Dans ce monde instable, la quête est celle de l’identité : transformés, ou dépossédés de leur nom véritable, les personnages (Chihiro, ses parents, Haku, les créatures qui entourent Yubaba, elle-même et sa sœur jumelle) cherchent à définir leur place, leur rôle et leur mission, et se laissent porter par les circonvolutions d’un univers en constante fluctuation, parfaitement métaphorisé par ces volutes de vapeur parfumées qui finissent par révéler la pureté originelle des êtres.
La fascination de ces thématiques n’a d’égale que celle provoquée par l’univers graphique qui se déploie. Sans limite dans son inventivité, le monde des esprits, convoque des araignées à charbon, des vieux bougons à bras multiples, des lampadaires unijambistes et des têtes sautillantes. Visuellement, le travail sur les décors est un enchantement continu, de ces parois florales inoubliables à l’architecture, entièrement construite sur la profondeur, érigeant une cité radieuse encerclée par un ciel océanique, terrain d’exploration de plus en plus vaste.
Car la dynamique, avant le retour au monde réel, est bien celle de l’affranchissement. De l’asservissement, d’un mauvais sort, d’une carapace, d’une enveloppe corporelle. De l’ignorance et de l’oubli, aussi, toutes ces thématiques concentrées dans la séquence la plus forte du film, celle de la reconnaissance entre Chihiro et Kohaku.
Instant suspendu, coup de foudre et retour de la mémoire, il résume la délicatesse infinie de ce film qui parvient à émouvoir en mêlant des mouvements contradictoires : la dissolution par les larmes et les écailles qui sèment un sillage émotionnel dans le ciel, l’acquisition de la connaissance du retour de la mémoire. L’émotion et la sagesse. L’initiation et l’adieu.
Terrassé par cette beauté, déconcerté par cette magie, le spectateur / accompagnateur de Chihiro aura découvert à sa suite sa part d’invisible en lui, ce monde mystérieux et complexe des esprits où se mêlent, en musique et sur les plus sublimes images qui soient, l’indicible de sa nature profonde, qui ne demande qu’à être explorée à nouveau.
Mercii Nulla ! Un seul visionnage et une lecture assez premier degré parfois un peu épaisse pour moi... Les pistes tracées ici sont super !! | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 23 Mai 2015 - 17:31 | |
| Effectivement son film le plus riche, presque jusqu'au trop-plein parfois, j'y avais surtout vu à l’époque une métaphore de la société japonaise et de l’entrée dans le monde du travail, la difficulté de conserver son identité dans une société qui exige de toi la soumission, sans pour autant rejeter la nécessaire intégration. Il est ainsi beaucoup question pour Chihiro de travailler sans relâche, de se soumettre à des taches ingrates en témoignant du respect à des créatures qui n'ont rien d'humain... du moins en apparence. Avec l’idée originelle de retrouver son nom et ses parents, autant dire son identité avant que la société la remodèle, et l'insouciance de la jeunesse. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 24 Mai 2015 - 9:37 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Effectivement son film le plus riche, presque jusqu'au trop-plein parfois, j'y avais surtout vu à l’époque une métaphore de la société japonaise et de l’entrée dans le monde du travail, la difficulté de conserver son identité dans une société qui exige de toi la soumission, sans pour autant rejeter la nécessaire intégration. Il est ainsi beaucoup question pour Chihiro de travailler sans relâche, de se soumettre à des taches ingrates en témoignant du respect à des créatures qui n'ont rien d'humain... du moins en apparence. Avec l’idée originelle de retrouver son nom et ses parents, autant dire son identité avant que la société la remodèle, et l'insouciance de la jeunesse.
Oui, c'est assez présent en effet. Mais j'y vois pour ma part davantage une tentative d'incarner un monde concret dans l'invisible de celui des esprits. Parce que du point de vue de l'application à la société nippone, les passerelles ne sont pas très claires à mon sens. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 24 Mai 2015 - 9:37 | |
| Dans une vénéneuse et profonde unité. La continuité entre L’Année dernière à Marienbad et Hiroshima mon amour est évidente : Resnais, sous l’égide d’un écrivain de renom, y explore la complexité amoureuse et l’expérimentation cinématographique. Deux éléments vont particulièrement faire le lien entre les deux œuvres : le traitement de la mémoire amoureuse (qui sera aussi le sujet principal de Je t’aime je t’aime) et celui des voix littéraires. Même omniprésence, même mise à mal de la langue par un accent à couper au couteau, les voix du couple dessinent une mélodie et une conversation volontairement dissolues. Phrases en boucle, incantations mystérieuses et verbalisation constante d’un amour révolu, la diction du couple tente de restituer les zones d’ombre de l’amour, du souvenir et de l’impossible fusion entre les êtres en dépit de leur attirance magnétique. A l’image de ce jeu de cartes dont on ne comprend les règles et pour lequel on perd à tous les coups, mais pour lequel on retente sa chance de façon frénétique, le dialogue est clivé. La conversation se poursuit d’un plan à l’autre, s’affranchit de l’espace, redessine le passé, réécrit en continu un archipel émotionnel qui nous happe et nous noie sous son infrangible beauté. L’artificialité de l’intime dans Hiroshima mon amour laisse ici place à une ambition plastique plus grande, une radicalité plus appuyée. Dans ce monde des nantis, tout est inféodé à une beauté froide et une humanité statufiée. Dans un registre certes radicalement différent, L’année dernière à Marienbad annonce les explorations architecturales du Shining de Kubrick : en mouvement sous les voûtes baroques, un travelling continu à l’éclairage somptueux distribue les espaces où les figurants posent, hiératiques. Au fil des corridors, des galeries de glaces ou des perspectives des jardins à la française se construit un monde aussi mort que fascinant, sépulcre assumé des passions humaines dévorées par le luxe et la minéralité. Pour le spectateur, il s’agit de se laisser aller à la contemplation, de se laisser gagner par la fascination hypnotique de cette splendeur visuelle, et de la mettre en correspondance avec les filaments de sens qu’elle laisse sourdre. L’amour est un récit, un souvenir qui s’écrit en continu, se fantasme, se déploie. Qu’on accepte sa part de fiction ou non, il se répand et investit temps et espace, transcende les barrières rationnelles de leurs dimensions respectives. Certes, L’année dernière à Marienbad est un film cérébral sur l’écriture, sur le cinéma et l’esthétique. Mais au détour d’un fragment, d’une discontinuité, dans les jointures de ces blocs esthétiques se logent ainsi la beauté mystérieuse des émotions humaines. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 24 Mai 2015 - 9:58 | |
| - Nulladies a écrit:
- RabbitIYH a écrit:
- Mais j'y vois pour ma part davantage une tentative d'incarner un monde concret dans l'invisible de celui des esprits.
Certes mais je ne verrais pas beaucoup de sens là-dedans si ce n’était pour symboliser autre chose. Le passage de l'enfance à l'age adulte et l’intégration dans la société étant des thèmes assez récurrents chez lui ça me semblait plutôt évident, la séparation des parents, la négation de l’identité, etc, tout ça déborde largement du thème des esprits. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 24 Mai 2015 - 10:02 | |
| Bien sur, c'est ce que je dis dans la conclusion. C'est juste le parallèle avec le monde du travail de la société japonaise que je trouve pas très clair, mais surtout parce que je ne vois pas trop quelle démonstration il desservirait. | |
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| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... | |
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| | | | En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... | |
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