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| En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... | |
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Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 4 Sep 2016 - 7:22 | |
| We don’t need no institution Il y a des palmes d’or intrigantes, tout de même, et qui nécessitent qu’on les contextualise. De la même façon qu’on peut expliquer que Michael Moore soit reparti palmé à la faveur d’une actualité crispant une grande part de la planète à l’égard de l’Amérique belligérante de Bush, If… répond clairement à mai 68, et sa façon d’aborder le système éducatif anglais a forcément eu à l’époque un retentissement certain, certains hauts dignitaires ayant plaidé pour son interdiction pure et simple. Le film n’est pas dénué d’intérêt : bien moins niais qu’un Cercle des poètes disparus sur le même sujet, influencé par l’esprit libertaire de l’époque, il reprend cette ambiance débridée qu’on pouvait déjà voir à l’œuvre dans Blow up : délitement du rythme, voire de l’intrigue, charges acides contre toutes les institutions, de l’éducation à l’Église en passant par l’armée, le tout interprété par une jeune garde spontanée et narquoise. Malcolm McDowell fait ici ses premiers pas, et on comprend d’emblée ce qui a motivé Kubrick à le choisir pour son Orange Mécanique : l’insolence, l’ironie de son attitude alliée à un visage singulier portent en germe tout ce qui fera l’effrayant Alex. La scène scandaleuse de sexe dans un café, (le premier nu frontal autorisé par la censure britannique, après, justement, celui plus bref dans Blow up) qui montre l’étreinte comme une sorte de combat, évoque elle aussi ce que sera la fameuse séquence avec la femme aux chats, qui en décuplera la violence. L’audace est reconnue, le discours légitime. Il n’en reste pas moins que le film a bien vieilli, et que sa dynamique générale souffre d’essoufflements. La quasi-totalité de film semble être un alignement de sketches sans réelle unité, alignement de sévices et de brimades conduisant à la catharsis finale, version old school d’une autre palme d’or, Elephant de Gus Van Sant. Du point de vue esthétique, on a beaucoup de mal à comprendre les raisons de l’alternance entre le noir et blanc et la couleur, et tout cela semble un peu vain, sans réelle réflexion préalable. If… fait partie de ces films dans lesquels le discours et l’audace l’emportent sur la forme, et l’on aurait apprécié davantage de finesse dans cet succession de portraits plus ou moins caricaturaux. Certes, la jeunesse et sa perversité, entre rébellion et mal être, prend une certaine épaisseur dans quelques séquences. Mais l’ennui l’emporte le reste du temps, et le film a bien du mal à briller en dehors d’un contexte favorable à son plébiscite. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 5 Sep 2016 - 7:19 | |
| Déconvenues à Naziland Alors que Blue Ruin avait su jouer avec les codes du film noir, Green Room change autant de couleur éponyme que d’univers : il sera ici question d’un slasher, genre formaté s’il en est. Le principe est dans la continuité de l’opus précédent : s’approprier un univers et les attentes qu’il induit, et y faire son nid. Mais la grande différence est sans doute celle du sujet : si l’ambiance héroïque et mutique permettait de décaper quelques poncifs dans Blue Ruin, le survival de Green Room a lui-même déjà fait l’objet de tant de déclinaisons qu’il n’est pas évident de proposer quelque chose de véritablement novateur. Après une splendide première image qui pourrait nous faire croire que la chambre verte sera celle de la végétation où s’est enlisée la nuit précédente un vanne de punks, le film semble mimer l’introduction de Massacre à la tronçonneuse : l’équipée branque sur la route, vers les bas-fonds d’une Amérique qui profite d’être à l’abri des regards pour s’adonner à ses pulsions les plus noires. Sur le plan visuel, Jeremy Saulnier confirme une maitrise impressionnante : la majeure partie du film consiste à tirer parti de deux contraintes : l’unité étouffante du lieu, bunker dans lequel les victimes sont autant retranchées que prises en tenaille, et celle de temps qui permet à la nuit de devenir un véritable protagoniste. La photographie, teintée comme promis d’un vert assez cradingue, restitue parfaitement le huis clos et les cadrages jouent sur les opportunités en forme de coups de poker que représentes les méandres du labyrinthe de béton. Le problème réside dans la façon dont la trame générale va agencer tout cet univers, qui semble d’avantage pertinent dans les plans fixes que les séquences qui consistent à s’en extraire. Répétitif, un peu abscons dans certaines coupures de rythme, le récit semble se questionner par moments sur la façon dont il doit s’y prendre pour atteindre les 90 minutes. La violence, souvent assez éprouvante, notamment dans la longueur accordée à certaines lacérations, n’atteint pas totalement son plus haut degré pour une raison assez simple : les personnages existent peu, et ne dépassent que rarement le statut de candidats à l’abattage, d’un côté comme de l’autre. Quelques tentatives de les voir s’adonner à une violence primale qu’ils refusaient dans un premier temps, notamment par le biais du maquillage, sont intéressantes, mais sans que l’essai soit transformé. S’ajoutent à cette tiédeur quelques tentatives d’humour assez incongrues, notamment à travers le gimmick éculé du disque à emmener sur une île déserte ; Saulnier, dans son écriture, navigue un peu à vue, et son film suit de trop près la destinée de ses personnages : s’il a su avec pertinence et un sens visuel aigu les enfermer dans ce lieu, il a bien de la peine à en sortir. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 6 Sep 2016 - 6:37 | |
| Venaison funèbre. Décidemment, les premiers films belges ont une puissance d’impact singulière : après le choc Bullhead il y a quelques années, Les Ardennes marque assurément la production cinématographique de 2016. Adapté de la pièce de théâtre de Jeroen Perceval (qui joue ici le rôle de Dave), le récit exploite habilement le resserrement propre à la scène : un nombre réduit de personnage, une tension croissante et une unité de lieu éponyme sur toute la dernière partie, dans laquelle la forêt ténébreuse accueille avec une empathie noire un jeu de massacre désespéré. Avant qu’on en arrive à de telles extrémités, il aura fallu passer par une situation plus étroite encore, celle d’un banal triangle amoureux : à sa sortie de prison, son frère cache à un homme rustre et inquiétant qu’il est le nouvel amant de son ex-compagne (Veerle Baetens, au visage fermé et dur, une nouvelle composition après son rôle plus contrasté dans Alabama Monroe). Dans ce drame intime initial, tout passe par le non-dit (« Il n’y a pas moyen de parler avec toi », finira par lui avouer son frère muselé face à tant de violence contenue) : le rêve secret des protagonistes, pour échapper au cercle tragique, n’est rien d’autre que celui de la banalité, d’un quotidien dans lequel on serait fier de s’être débarrassé des addictions, et surtout de la toxicité d’un frère dont le retour contamine brutalement tout ce qui pouvait s’être fragilement construit. La fraternité comme un devoir, ou un poids immuable : telle est la dynamique perverse des échanges. Kenny, l’ex taulard qui a su se taire pour préserver son frère, a de prime abord tout du beauf à qui on excuserait sa primalité, notamment par le regard terrible que sa mère porte sur lui. Mais à mesure que le récit progresse, sa stature dominante entraine le petit groupe vers les abimes, et déplace l’empathie vers les taiseux et les menteurs. L’écheveau tragique est inextricable : tirer sur un fil, c’est resserrer un autre nœud, et la mécanique implacable trouve son apogée dans une forêt où les troncs sont autant de barreaux à une issue condamnée d’avance. Robin Pront sait jouer de la patience, du silence et des trognes patibulaires pour laisser se diffuser l’atmosphère poisseuse de son crépuscule. La photographie est superbe, et la musique, une électro poseuse poussée à fond dans les voitures de ces pauvres gars dénués de sourire, achève l’ambivalence : on se laisse porter tout en étant en permanence maintenus à distance. Les dérapages eux-mêmes se font toujours dans une lenteur que la brume sylvestre vient savamment empeser : du personnage terrifiant de Stef, dépeceur des bois, à l’enlisement de la situation compliquée par l’irruption d’autruches (véridique), le récit pourrait paraître grotesque, mais tient en réalité toujours l’équilibre sur une ligne de crête maintenue par les personnages, et un twist, pour une fois, d’avantage émouvant qu’émoustillant. La tragédie a ceci d’intemporel qu’elle peut se permettre de revisiter sans cesse les mêmes tensions : la fraternité, vectrice d’une solidarité qu’on ne doit pas questionner, n’a pas fini d’inspirer les conteurs de sombres histoires. La forêt des Ardennes en dispense une d’un éclat particulièrement fascinant. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 7 Sep 2016 - 6:51 | |
| American duty C’est sur un tapis roulant qu'apparaît le jeune premier Dustin Hoffman, une séquence inaugurale qui sera par ailleurs reprise par Quentin Tarantino dans Jackie Brown : avant de subir les félicitations contraignantes de toute la génération parentale, la jeunesse est déjà programmée. Dans ce monde moribond, tout semble prédéterminé : sa réussite, son emploi (le très ironique « Plastics ! »), et même sa sexualité que la cougar Mrs Robinson va prendre en charge, de gré ou de force. Cette inversion du motif de Lolita de Kubrick, sorti cinq ans plus tôt vaut génère une désillusion nouvelle : si l’on suivant la déchéance passionnelle de l’un pour la jeune nymphette, on assiste ici surtout à une aventure blasée et exclusivement physique. Le lauréat est le film attendu sur la jeunesse. Avant lui, La Fureur de vivre avait certes ouvert la voie, mais resté engoncé dans un classicisme encore maladroit. Avec le film de Mike Nichols, le Nouvel Hollywood fait son entrée : cynisme du propos, audace des points de vue permettent d’opposer deux mondes. Si les aussi séminaux Bonnie & Clyde et Easy Rider jouent la carte de la sédition, c’était pour traiter d’un monde underground et représenter la violence à post code Hays ; ici, c’est la jeunesse bourgeoise qui fait sa révolution de velours (admirablement soulignée par la BO de Simon & Garfunkel), témoignant d’un étouffement que l’aquarium et le scaphandre métaphorisent à merveille. Formellement, l’esthétique est au diapason de ces élans libertaires : montage en cuts ultrarapides, surcadrages, plans presque abstraits (le fameux point de vue sous la jambe de Mrs Robinson, le jeu sur les reflets des tables en verre, etc.) achèvent d’enfermer un personnage pour le moment dépourvu de toute individualité. Le cadre wasp et ses codes est traité sous toutes ses coutures, et l’on montre avant tout sa capacité à générer des névroses. Dans ce portrait au vitriol que cherchera à faire perdurer Amercian Beauty quelques décennies plus tard, la comédie s’invite donc tout naturellement. Car le récit montre avant tout la façon dont un jeune se trompe dans son émancipation : les ballets dans l’hôtel, le fait de devoir changer de nom en disent long sur son incapacité à devenir lui-même. Les ellipses elles-mêmes ne disent pas autre chose : en quatre ans, Benjamin se contente d’être allongé sur des lits ou flottant sur une piscine : certes, il a quitté le fond du bassin, mais il reste toujours à la dérive. Il fallait sans doute s’immerger dans ce cynisme pour que puisse surgir la véritable romance, qui se présente pourtant sous les feux de l’injonction : poussivement favorisé par ses parents, formellement proscrite par sa maitresse, Elaine est donc à fuir, avant qu’elle ne dévoile cet indicible charme qui permet enfin l’échappée du cadre. L’émancipation se fait dès lors sur tous les fronts : l’amour s’affranchit des codes et permet une traversée du pays au pas de course, le sabotage d’une cérémonie et d’un sacrement, la dévoiement d’un crucifix au profit du close combat et le rejet de toute la tradition adulte. De ce point de vue, Le Lauréat est une romcom fraiche, insolente et résolument moderne, un coup de pied inconscient dans un univers rigide qu’on laisse derrière soi, retranscrit à merveille dans l’ultime plan du film : les noces clandestines et publiques, iconoclastes et enfantines, de deux sourires hébétés et ravis à l’arrière d’un bus. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Sam 10 Sep 2016 - 18:17 | |
| La violence et le sacré. Le monde sur lequel se lève le rideau de l’épopée Princesse Mononoké est malade : si la tribu d’Ashitaka y vit en paix, c’est parce qu’elle a accepté l’exil depuis cinq siècles, et du lointain vient désormais une créature qui porte en elle une infection qui va contraindre le protagoniste à partir lui-même. Quitter un endroit dans lequel on était déjà reclus, pour rejoindre un domaine frontalier où se joue la lutte entre l’homme et la nature : l’univers de Miyazaki est toujours aussi fluctuant, questionnant la cohabitation entre l’industrie humaine, ici une forge, et l’évidence d’un monde qui la précède et la dérange, l’inquiète et la contient : celui des divinités. Cette question essentielle sera aussi le point de départ de Chihiro, avec lequel Mononoké partage aussi cette thématique de l’infection par la créature venue se purifier de toute la pollution humaine. En contrepoint de la guerre, des alliances complexes entre humains, factions autonomes ou troupes impériales, et d’un univers obscur où l’on s’ingénie à parfaire l’orfèvrerie des arquebuses, le récit propose donc une incursion dans la nature, représentée ici par la forêt. C’est peu de dire à quel point cette évocation sera marquante, et créera un précédent dans le film d’animation. La forêt de Miyazaki est la fertilité silencieuse, la majesté profuse et la profondeur hypnotique. Saine et généreuse, à l’image de cette formidable invention graphique qu’est la personnification des sylvains, elle bruisse ou se fait l’écrin de scènes primales ayant toute l’intensité des récits fondateurs. L’apparition de Mononoké entourée de ses loups, au bord de la rivière, ou celle, sublime, du dieu cerf entre les troncs génèrent une sacralité unique dans le domaine de l’animation, épiphanies qui tiennent en respect les humains comme tous les spectateurs, particulièrement les adultes retrouvant cette admiration béate qui fait la beauté de l’enfance. Mais la canopée ne peut hélas bruisser et chatouiller la myriade de sylvains pour l’éternité. La lutte qui s’engage avec les hommes n’est pourtant pas unilatérale : de la même façon qu’Ashitaka porte en lui le mal, ou que l’héroïne éponyme appartient malgré elle aux deux camps, la nature peut aussi se révéler violente et sauvage, à l’image des sangliers ou des orangs outans. Cette réversibilité, y compris dans le choix du camp qu’on occupe, déconcerte autant qu’elle fascine le spectateur occidental qui en avait déjà fait l’expérience dans Porco Rosso, et la retrouvera souvent par la suite chez le cinéaste. Film de guerre et de territoire, l’épopée prend néanmoins souvent le parti de décaler le regard sur le spectacle attendu : c’est souvent les clans secondaires que l’on suit, et les grands combats sont présentés sous forme de résumés, après coup. De l’empereur, on ne verra rien, et cette lutte se fait dans un lieu lui-même aux confins de ses territoires. C’est peut-être pour cette raison que le récit fait la part si belle aux femmes : de Dame Ebochi à Mononoké, en passant par les ouvrières de la forge, les enjeux passent par leur force singulière, où se mêlent l’énergie de la revendication et la sensibilité au monde mystérieux qui les entoure. La réversibilité atteint aussi la narration générale : le dénouement n’est pas, comme on peut traditionnellement s’y attendre, un retour à l’ordre, mais l’avènement d’un nouveau, par la destruction et les apprentissages qu’elle génère dans la douleur. Nul message idéalisé, et qui dessinerait les contours d’une utopie : la géographie du conte dépasse le mythe fondateur pour en proposer le prolongement, fondé sur le compromis lucide et empli de sagesse. Il ne s’agit pas de revenir au mythe fondateur d’une nature débarrassée de l’homme, mais d’établir la possibilité d’un voisinage paisible. Au terme de cette incursion dans la folie des hommes et la magie sacrée de la nature, de ce chant puissant de la terre et des balafres par lesquelles elle ne cesse de croitre, Miyazaki aura entrainé à sa suite un spectateur émerveillé et béat, excédant largement le programme qu’il avait fixé à son personnage : porter sur le monde un regard sans haine. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 5:14 | |
| Chef-d'oeuvre, toujours dans mon top 3 du bonhomme, mon préféré étant Nausicaa. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 6:02 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Chef-d'oeuvre, toujours dans mon top 3 du bonhomme, mon préféré étant Nausicaa.
Toujours pas vu, celui là, tiens... | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 7:54 | |
| Étonnamment vu son ancienneté à l'échelle du cinéma d'animation, il reste visuellement somptueux mais c'est surtout le récit d'une ampleur assez hallucinante, contenant déjà tout ce qui viendra après, qui en fait le sommet de sa filmo à mon avis. En 3 je mettrais Le vent se lève sinon. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 8:53 | |
| Ah oui ? Il faudra à l'occasion que je lui redonne sa chance. Non pas que j'ai pas aimé, mais je le mets en deçà de bien des autres. Chihiro est pour moi son sommet, j'adore Porco Rosso, Le château dans le ciel, et Totoro of course. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 9:50 | |
| Je trouve Chihiro un peu surestimé pour ma part, blindé de métaphores sociales trop évidentes, et il ne m'émeut pas autant que les trois films sus-mentionnés ou encore le sous-estimé Ponyo qui serait sans doute mon numéro 4. Mais bon c'est que des CO tout ça, on va pas pinailler. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 11 Sep 2016 - 11:51 | |
| Noise in the hood. Stand by me partage avec La dernière séance de Bogdanovich un regard rétrospectif sur la jeunesse adolescente de 1951, à une différence près, mais de taille : si le premier le fait avec 20 ans d’écart, le second le propose en 1986, ce qui change à peu près tout. A cette époque, Les Goonies ont déjà sévi et infuse ce regard à la fois clinquant et réaliste sur la jeunesse : vulgaires, spontanés, déconnectés du monde des adultes, rivés à leurs private joke et leur propre langage (une constante chez Stephen King, du « skin it » au « pinky swear ») le tout dans une esthétique solaire qui fleure bon la forêt de carte postale comme elle n’existe qu’en Amérique, impeccable et fonctionnelle. Bien entendu, le duo Reiner/King (Stephen, pas Ben E., à qui on doit la chanson éponyme qui ne sera diffusée que dans le générique de fin) ne joue pas sur le registre des attractions cartons pâte, et ambitionne une tonalité plus intimiste. Reconnaissons que l’importance du thème de la mort, même si un peu lourdement saupoudré (le grand frère, le revolver…) donne une certaine gravité au propos, notamment dans cette quête un peu absurde d’un cadavre d’enfant au bout du chemin. Tout cela n’est pas dénué de prétention, et l’obsession d’émouvoir en grattant le vernis des apprentis gros dur se fait souvent au forceps, le parcours étant jalonné de la confession de chacun d’entre eux, appesanti par une voix off plus que dispensable. La fracture sociale à venir entre des gamins pour le moment fusionnels, le miroir déformant de la bande des grands avec qui se joue une course assez idiote, il faut le dire, semble dire sur un mode mineur les dérives d’une société fondée par et pour la violence. Certes. Mais ce n’est pas une très fade épiphanie avec un biche (qu’on définira comme telle parce que la voix off nous l’a indiqué) un concours de blague de cul ou une histoire – assez amusante, il faut l’avouer – de vomi collectif qui nous rendra tout ça prégnant ; ni cette pseudo réflexion sur l’origine de l’écriture, finalement substituable par n’importe quelle autre vocation. Stand by me semble faire partie de ces films qu’il vaudrait mieux avoir vu à sa sortie, et dans un âge proche de celui de ses protagonistes. Non pas que l’enfance ne puisse émouvoir les adultes, qu’on aille voir du côté de Super 8 ou Moonrise Kingdom pour s’en convaincre. Mais ce regard vieilli et falot appartient à une période révolue sur laquelle il semble que la nostalgie concerne d’avantage le film lui-même que les thématiques qu’il peine à traiter. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Ven 16 Sep 2016 - 18:27 | |
| Bah tu peux garder le bien lourdaud et ultra maniéré Moonrise Kingdom, je garderai volontiers ce très joli film à mon avis bien supérieur à l'autre collab King/Reiner, Misery. Prétendre qu'il faudrait l'avoir vu à sa sortie et à l'âge de ses personnages pour l'apprécier, ça n'est pas non plus dénué de prétention, hihi. |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Ven 16 Sep 2016 - 21:12 | |
| - RabbitIYH a écrit:
- Bah tu peux garder le bien lourdaud et ultra maniéré Moonrise Kingdom, je garderai volontiers ce très joli film à mon avis bien supérieur à l'autre collab King/Reiner, Misery. Prétendre qu'il faudrait l'avoir vu à sa sortie et à l'âge de ses personnages pour l'apprécier, ça n'est pas non plus dénué de prétention, hihi.
Je vois pas où est la prétention en fait. Et Moonrise, c'est un CO. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Lun 19 Sep 2016 - 6:48 | |
| Amour sans fin. Le premier véritable long métrage (si l’on ne compte pas les films de franchise réalisés auparavant) de Mamuro Hosoda contient en germe tout ce qui fera la touchante beauté de son œuvre à venir : sous couvert d’un registre fantastique, il évoque avant tout la fragilité humaine et les émois adolescents, la fuite du temps et ce passage décisif de l’enfance à la fin de l’adolescence : autant de thèmes qui traversent Les enfants loups tout comme Le Garçon et la bête. L’animation est scindée en deux tendances, comme elle le sera de façon plus ample encore dans Summer Wars : traditionnelle pour le récit encadrant, ambitieuse et plus numérique pour les séquences de sauts dans le temps, particulièrement réussies. Le récit s’inscrit quant à lui dans une thématique assez proche d’Un jour sans fin : la possibilité offerte à la protagoniste de revivre et d’arranger un événement qui ne lui sied pas. Au-delà de la dimension comique du procédé, Hosoda symbolise surtout cette croyance typiquement adolescente de l’éternité de sa jeunesse ou de la pérennité du bonheur. L’impuissance avec laquelle Makoto lutte contre l’inéluctable sentiment amoureux ou les erreurs commises fait du film une assez jolie fable sur la présomption de l’individu à vouloir contrôler sa destinée. Le film n’est pas pour autant exempt de défauts : la mièvrerie guette de temps à autre dans ces débats entre amour et amitié, et la fin qui n’en finit pas s’embourbe un peu dans des explications assez fumeuses tentant d’expliquer les voyages temporels. Ce n’était pas utile : le jeu sur les répétitions, les séquences animées revues avec obsession (la descente à vélo vers le train, motif convergent du récit) suffisaient au plaisir du spectateur : c’est bien là que se loge la maitrise du réalisateur qui devra attendre encore quelques films avant de la mettre au service d’une écriture un peu plus ambitieuse. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mar 20 Sep 2016 - 6:54 | |
| Les arcanes du blockbuster, chapitre 25 Dans la corbeille ce matin, des cartes et des lapins, des chapeaux et des foulards colorés, des vessies et des lanternes, ainsi qu’un grand bol de margarine. - … - Ouais je sais, c’est chiant. Déjà que le premier était tout pourri, là, je cale vraiment. - Tous les twists ont déjà eu lieu, qu’est-ce qu’on peut bien… - Eh, tu sais quoi, ferme juste ta gueule. Bryan a fait une formation d’écriture chez Wallmart le mois dernier. Vas-y, dis-leur. - Vous êtes tellement 2016 les mecs, j’ai assez envie de vous laisser dans la merde. Mais bon, comme le chef l’exige, goûtez à la magie de la next gen en matière d’écriture ! - Putain mais lâche ce lapin et accouche. - C’est pas compliqué : le monde de l’illusion, c’est la magie de l’inversion. Au lieu de partir d’une trame, d’un arc, on commence par les détails. - Du genre des répliques ? - Voilà. - Mais le contexte ? - On s’en branle, ça vient après. Allez-y, l’esprit Insaisissables, c’est quoi comme punchline ? - You gotta be kiddin me - How is this possible ? - It’s not my game, … it’s yours. - I know because you know. - Voilà, c’est lancé ! On fait pareil avec les tours. Balancez, des trucs qui font rêver. - De la pluie qui remonte ! - Un plateau de sushi transformé en attaché case ! - Un avion qui vole MAIS EN FAIT non ! - Un méchant MAIS EN FAIT un gentil ! - Une exécution MAIS EN FAIT pas vraiment on finira par dire que tout était prévu pour que pas ! - Un bourreau MAIS EN FAIT une victime ! - Un vol de puce électronique qui est une vraie MAIS EN FAIT une fausse MAIS EN FAIT une vraie MAIS EN FAIT on sait plus on s’en branle elle nous fait trop GAGNER ! - Vous voyez, quand vous vous lâchez un peu. C’est bien, ce concept du MAIS EN FAIT. On a tout ce qui faut. - Par contre chef, il fallait pas qu’on explique les tours dans le précédent ? - Ah merde, c’est vrai. Bon, on se la joue minimal pour le coup. - Y’a toujours l’hypnose. - VOILA : je te la joue Kaa, aie confiance, et tu vas te téléporter ou confesser tes intentions machiavéliques à la télé. Trop bien. - Et pour le vol de la puce méga importante, j’avais pensé qu’un mec de l’équipe pouvait tousser pour détourner l’attention. - Nan mais quand même… - Laisse, je like. Si ça, ça passe, on pourra en faire une franchise éternelle. - Après, on saupoudre. On racle un peu les fonds, c’est la fin de l’été, mais il me reste de l’evil twin, une sidekick qu’a pas oublié d’être drôle et une scène d’ouverture avec un papa qui meurt, caution trauma tu vois la magie aussi ça peut faire mourir. - Bien bien bien. Le liant, c’est l’esthétique du clip qu’on avait dans le premier avec le frenchie du terrier, là. T’avais noté, Nick ? - Euh non, c’était le job de Dick. Mais tu l’as viré après DeadPool. La scène du gode, tu te rapp… - Ah oui. C’était pas très malin non plus. Les godes, faut pas les voir. L’enculage, on le fait par diversion. Tout le dernier quart d’heure, vous expliquez au spectateur à grandes cascades de lubrifiant tous les MAIS EN FAIT. - Et pour revenir à l’esthétique, c’était pas compliqué en fait : mouvement permanent, musique de merde genre Las Vegas pour bus de japonais, et plein de gens qui applaudissent. - Et des projecteurs de couleur. - Et Jesse qui regarde de côté pour faire genre. - Et… - Ouais bon, on a compris. - Chef, c’est symbolique en fait. On devait écrire un scénar MAIS EN FAIT… - Putain, tu me fatigues. - Merci chef. Putain, j’adore les symboles en vrai. On va les enfiler, MAIS EN FAIT on va trop cartonner. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 21 Sep 2016 - 6:46 | |
| Echo Trip Je ne peux pas savoir si cette jungle a amorcé en moi le processus qui en a mené tant d’autres à la folie. Si c’est le cas, je demande ta compréhension, car je ne peux décrire avec des mots la beauté et l’éclat dont je fus témoins pendant ces heures merveilleuses. A mon retour, j’étais un autre homme. Theodor von Martius, Amazonie, 1909. Placée en exergue du film, cette citation a tout d’un programme : suivre le parcours de l’homme blanc au contact d’une nature dans sa forme la plus primitive, pour le meilleur et pour le pire. On retrouve ici les thèmes des plus grandes œuvres, du Conrad revisité par Coppola dans Apocalypse Now et sa remontée du fleuve, aux incursions de Werner Herzog dans Aguirre ou Fitzcarraldo. Audacieux dans sa structure, le film restitue deux explorations avec le même guide à quelques décennies de décalage. L’un marche sur les traces de l’autre, disparu mais ayant laissé un livre issu de notes envoyées par un compagnon. Le mystère de leurs liens, notamment une plante rare aux vertus puissantes, se tisse au fil d’allées et venues qui fusionnent dans deux éléments essentiels : le fleuve, et le guide, qui supplante progressivement le regard traditionnellement occidentalo-centriste. Du blanc, on voit les ravages qui font de l’Eden un enfer : une mission brimant les indigènes et interdisant aux enfants de parler leur langue, avant que celle-ci ne devienne, dans la deuxième temporalité, une secte folle et furieuse ; la culture du caoutchouc, qui, littéralement, visuellement et symboliquement, saigne à blanc la forêt. La présence des Colombiens, en ce début de XXème siècle, reste fantomatique, mais laisse des stigmates profonds. Les explorateurs allemands, oscillent entre l’humilité et l’ambition de fouler des terres inconnues. Dans un maelstrom de langues (locale, espagnol, allemand) et de détours, les expéditions se muent en errances, les quêtes semblent absorbées par l’instance qui les contient et qui les domine : la Nature. Dans un noir et blanc ciselé par un contraste fascinant, la jungle colombienne vibre d’une mouvance et d’une lueur hypnotiques. La force de l’eau du fleuve, les jeux sur sa surface irisée par des embarcations qui ne demande qu’à se délester, les mille et une nuances des feuillages et des branchages, le noir de la terre accueillent autant l’homme qu’ils le dévorent. Tout l’enjeu du film est là : dissoudre la démarche anthropologique, la linéarité narrative au profit d’une prise de contact, d’un « lâcher tout » que Gracq évoquant déjà dans Un balcon en forêt. Une contemplation qui ne se fait pourtant pas sans violence : on dérive, on vomit ses tripes, on s’écorche à la beauté primale d’un monde aussi profus que muet. Ciro Guerra ne s’en cache pas : ce voyage est celui d’un retour aux sources d’un pays et d’un peuple sur le point de disparaitre. Parce qu’il garde sa part d’indicible, parce qu’il ne fait pas l’économie des traumatismes issu de sa cohabitation avec la sauvage et irrépressible modernité, par sa puissante beauté formelle et la richesse complexe de ses protagonistes, L’étreinte du Serpent est un déplacement spatial et temporel majeur : un accès à cette dimension alternative des « corps vides », du Chullachaqui, d’un « temps hors du temps » qui permet d’approcher, par le regard au moins, un peuple dont on n’entendra jamais la chanson. Et de réapprendre, enfin, à rêver. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 22 Sep 2016 - 12:06 | |
| - Nulladies a écrit:
- RabbitIYH a écrit:
- Bah tu peux garder le bien lourdaud et ultra maniéré Moonrise Kingdom, je garderai volontiers ce très joli film à mon avis bien supérieur à l'autre collab King/Reiner, Misery. Prétendre qu'il faudrait l'avoir vu à sa sortie et à l'âge de ses personnages pour l'apprécier, ça n'est pas non plus dénué de prétention, hihi.
Je vois pas où est la prétention en fait. Dans le fait qui c'est loin d'être une vérité partagée par beaucoup, sachant combien le film, généralement, est apprécié ? Mais bon c'était surtout un pied de nez à ta formule, car pour moi aucune prétention dans ce film au récit particulièrement humble au contraire. - Nulladies a écrit:
- c’est bien là que se loge la maitrise du réalisateur qui devra attendre encore quelques films avant de la mettre au service d’une écriture un peu plus ambitieuse.
Même pas, juste un. Et malgré ses faiblesses auxquelles j'acquiesce bien volontiers, ce premier film est pour moi meilleur que son dernier, décidément une déception me concernant. |
| | | Azbinebrozer personne âgée
Nombre de messages : 2751 Date d'inscription : 12/03/2013 Age : 63 Localisation : Teuteuil Humeur : mondaine
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Jeu 22 Sep 2016 - 16:20 | |
| - Nulladies a écrit:
Echo Trip
Je ne peux pas savoir si cette jungle a amorcé en moi le processus qui en a mené tant d’autres à la folie. Si c’est le cas, je demande ta compréhension, car je ne peux décrire avec des mots la beauté et l’éclat dont je fus témoins pendant ces heures merveilleuses. A mon retour, j’étais un autre homme. Theodor von Martius, Amazonie, 1909.
Placée en exergue du film, cette citation a tout d’un programme : suivre le parcours de l’homme blanc au contact d’une nature dans sa forme la plus primitive, pour le meilleur et pour le pire. On retrouve ici les thèmes des plus grandes œuvres, du Conrad revisité par Coppola dans Apocalypse Now et sa remontée du fleuve, aux incursions de Werner Herzog dans Aguirre ou Fitzcarraldo. Audacieux dans sa structure, le film restitue deux explorations avec le même guide à quelques décennies de décalage. L’un marche sur les traces de l’autre, disparu mais ayant laissé un livre issu de notes envoyées par un compagnon. Le mystère de leurs liens, notamment une plante rare aux vertus puissantes, se tisse au fil d’allées et venues qui fusionnent dans deux éléments essentiels : le fleuve, et le guide, qui supplante progressivement le regard traditionnellement occidentalo-centriste. Du blanc, on voit les ravages qui font de l’Eden un enfer : une mission brimant les indigènes et interdisant aux enfants de parler leur langue, avant que celle-ci ne devienne, dans la deuxième temporalité, une secte folle et furieuse ; la culture du caoutchouc, qui, littéralement, visuellement et symboliquement, saigne à blanc la forêt. La présence des Colombiens, en ce début de XXème siècle, reste fantomatique, mais laisse des stigmates profonds. Les explorateurs allemands, oscillent entre l’humilité et l’ambition de fouler des terres inconnues. Dans un maelstrom de langues (locale, espagnol, allemand) et de détours, les expéditions se muent en errances, les quêtes semblent absorbées par l’instance qui les contient et qui les domine : la Nature. Dans un noir et blanc ciselé par un contraste fascinant, la jungle colombienne vibre d’une mouvance et d’une lueur hypnotiques. La force de l’eau du fleuve, les jeux sur sa surface irisée par des embarcations qui ne demande qu’à se délester, les mille et une nuances des feuillages et des branchages, le noir de la terre accueillent autant l’homme qu’ils le dévorent. Tout l’enjeu du film est là : dissoudre la démarche anthropologique, la linéarité narrative au profit d’une prise de contact, d’un « lâcher tout » que Gracq évoquant déjà dans Un balcon en forêt. Une contemplation qui ne se fait pourtant pas sans violence : on dérive, on vomit ses tripes, on s’écorche à la beauté primale d’un monde aussi profus que muet. Ciro Guerra ne s’en cache pas : ce voyage est celui d’un retour aux sources d’un pays et d’un peuple sur le point de disparaitre. Parce qu’il garde sa part d’indicible, parce qu’il ne fait pas l’économie des traumatismes issu de sa cohabitation avec la sauvage et irrépressible modernité, par sa puissante beauté formelle et la richesse complexe de ses protagonistes, L’étreinte du Serpent est un déplacement spatial et temporel majeur : un accès à cette dimension alternative des « corps vides », du Chullachaqui, d’un « temps hors du temps » qui permet d’approcher, par le regard au moins, un peuple dont on n’entendra jamais la chanson. Et de réapprendre, enfin, à rêver.
Ouiiiii ! Ultra recommandable pour tous les aventuriers du forum à la recherche de leur âme primitive ! | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 25 Sep 2016 - 6:39 | |
| Mutant de l’innocence. Bong Joon-ho aura exploré tous les genres : après la comédie sociale et canine, après le polar sociétal, place au film fantastique. Dans cette hétérogénéité, l’idée reste la même : une exploration des êtres et de leurs contradictions, un portrait de la cohabitation du grotesque et du sublime chez ces fragiles mais attachantes créatures que sont les hommes. The Host joue donc la carte de la créature mutante (merci les américains et leur pollution des eaux) déboulant dans une Corée que le cinéaste va diviser en deux entités bien distinctes. D’un côté, la nation et ses instances décisionnaires, des militaires aux médecins, en passant par les médias et la police, tous vus par le même prisme assez radical : incompétents, inhumains, savants fous, en tous points responsables, voire métaphorisés par cette créature monstrueuse à laquelle ils ont logiquement donné naissance. Manipulation, expérimentation médicale, empoisonnement de la population toute entière dressent le portrait d’une société malade et décadente. De l’autre, une famille à l’autre bout du spectre social, une fratrie vaguement dégénérée par la malnutrition et les carences d’une parentalité dépassée. C’est là l’occasion pour Bong Joon-ho des portraits qu’il affectionne, et consistant à exposer en premier lieu le ridicule de ses personnages. Comme souvent, l’aspect comédie asiatique génère quelques débordements un peu déconcertants (notamment lors des pleurs à la veillée mortuaire), et le mélange des registres peut dérouter par instants. Mais c’est aussi le gage de séquences qui se détachent de l’ensemble et révèlent soudainement l’humanité des personnages, à l’image de la séquence du repas où l’on nourrit la fillette disparue, ou la mort du père sous la pluie. La construction du récit, quelque peu systématique, procède sur la dynamique d’une démonstration : la première version déficiente de la cellule familiale se voit mise à l’épreuve par la disparition de la fille, mais c’est la mort du patriarche qui permettra, dans un second temps, la fédération des diverses forces (la contestation du diplômé au chômage, le tir à l’arc de la sœur, l’amour et la persévérance du simple d’esprit) et la victoire sur la bête, mais pas forcément dans les cœurs. Au-delà du récit, c’est évidemment sur la forme qu’on attend un cinéaste de la trempe de Bong Joon-ho. La grande lacune est malheureusement la bête numérique, très peu convaincante, trop lisse, et qui tranche avec la vérité des êtres avec lesquels elle interagit. Cela n’empêche pas certaine belles séquences, notamment la tentative de fuite de jeune fille, où le silence et la durée instaurent une tension efficace. Mais c’est surtout dans son exploration urbaine que le réalisateur se surpasse. Après la campagne de Memories of Murder, la ville et l’architecture sont ici les grands éléments esthétiques, des rampes d’accès aux égouts, des rives bétonnées du fleuve à la ville nocturne. La photo joue sur les tonalités noires et grises, qu’on retrouve d’ailleurs sur les visages souillés des deux enfants, et atteste d’un travail graphique particulièrement soigné. Autant d’éléments qui contribuent à faire de The Host un film à la hauteur de son créateur : bigarré, exigeant, jouant avec les codes tout en maintenant cette attention portée aux individus, pour un résultat certes moins fascinant que Memories of Murder, mais qui reste tout à fait passionnant. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 25 Sep 2016 - 6:40 | |
| Les contours du néant. Dans la séquence d’ouverture, un flic se penche pour observer, sous une chape de béton, dans une ornière au beau milieu d’un champ, le corps inerte d’une femme. Il s’éclaire à l’aide d’un miroir de poche. Face à lui, un enfant, accroupi sur la dalle, le contemple et l’imite, répétant tout ce qu’il dit. Violent, pictural, grotesque, inapproprié : l’essence même de Memories of murder vient de s’imposer au spectateur, mais il lui faudra plus de deux heures et 17 ans de récit pour parvenir à en prendre la pleine mesure. Adapté d’un fait divers réel qui vit sévir un serial killer à la fin des années 80 en Corée, le film est avant tout une reconstitution minutieuse en forme d’histoire de l’investigation. Deux flics ruraux, dénués de toute méthode, laissent saccager les scènes du crime et se contentent de cuisiner violemment les suspects potentiels. Les analyses ADN supposent qu’on envoie les échantillons jusqu’aux Etats Unis, et le profilage n’est pas encore d’actualité. D’où cet amateurisme généralisé, accentué par les tensions avec la Corée du Nord, entre émeute et alertes imposant un blackout régulier. L’arrivée d’un policier urbain, Seo, remet en cause les violences policières et impose une approche plus cérébrale. L’enquête paysanne cède le pas à un regard plus méthodique et renouvelle le regard sur une série de meurtres qui par là-même gagnent en épaisseur et en gravité. Memories of murder relate avant tout une série d’échecs, et multiplie les ruptures de ton, non seulement pour nous mettre face à un laborieux quotidien qui patauge, mais aussi à l’impossibilité de circonscrire la puissance indicible du mal. Sur une structure croisée, la violence change de camp : Park et son acolyte l’emploient au quotidien, tandis que Seo la réprouve, jusqu’à l’inversion des rôles lorsque l’obsession et l’impuissance dérèglent tous les comportements. A chaque étape, la violence, le mensonge ou le meurtre sont envisagés comme des solutions. A chaque fois, on comprend que ce serait la victoire finale du mal par le mal. Pour composer la partition de cette tragédie Bong Joon-ho mise sur deux éléments principaux : les décors et la lumière. Des premiers, on relève une grande variété d’espaces, des champs à la forêt, d’une carrière aux voies ferrées, toutes contaminées par un mal rampant et insaisissable. De la deuxième, des intérieurs laiteux de salles d’interrogatoires, et une exploration acharnée de la nuit, terrain propice aux contes noirs du tueur. Ces deux éléments convergent vers un tunnel sous la pluie, filmé de deux points de vue : depuis l’intérieur, vers le déchainement de violence des justiciers impuissants, ou vers l’intérieur, une obscurité dans laquelle s’enlise tout espoir de résoudre l’affaire. C’est dans ces cahots, ces élans de révolte ponctués d’abattement (« pas de témoin, pas de preuve ») que se loge le propos réel du film : des pantins s’agitant face au néant, et un cinéaste construisant avec minutie un paysage aussi vide que mutique, pour dessiner les contours d’un effroi nouveau. Pour qui voudrait présenter la quintessence du cinéma coréen, Memories of murder s’impose sans conteste. Polar complexe, film historique, comédie de mœurs et réflexion sur le mal, le film reste 13 ans après sa sortie un modèle à l’aune duquel on juge bien de ses suiveurs. | |
| | | guil blacksessions.com
Nombre de messages : 5560 Date d'inscription : 31/08/2011 Age : 53 Humeur : fatigué
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Dim 25 Sep 2016 - 12:21 | |
| tu t'y entends hein pour donner envie de voir des films ! du coup je me lance dans les trois derniers ci-dessus : l'étreinte du serpent, the host et memories of murder !! _________________ ça suffa comme ci
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| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| | | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 28 Sep 2016 - 6:40 | |
| Grieving Las Vegas C’est par un petit polar modeste que Paul Thomas Anderson fait ses débuts, s’entourant déjà d’un certain nombre de comédiens (John C. Reilly, Philip Baker Hall, ainsi que Seymour Hoffmann pour une apparition) qui lui deviendront fidèles pour les deux films suivants, sur bien des points l’expansion des germes plantés ici. Le recours à la musique presque permanente qui trouvera son apogée dans Magnolia, la fascination pour les plans-séquence (ici, entre les machines à sou de Las Vegas) qui rythmeront les scènes collectives de Boogie Nights sont autant de promesse de la patte PT Anderson. L’intrigue recèle sa part de mystère propre à susciter un certain intérêt. Le personnage de bon samaritain qui va aveuglément soutenir le premier loser venu crée un effet d’attente sur ses motivations: à quel moment va-t-il exposer la réalité de ses intentions ? Qui va trahir qui ? Sur fond de jeux de cartes, la thématique du bluff contamine les rapports entre les personnages. La rencontre avec une femme qui joue aussi double jeu puisqu’elle se prostitue sans le dire clairement achève la partition trouble. Les dérapages sont en sommeil, ils n’ont qu’à surgir : c’est là tout le sel de la première partie, qui joue beaucoup sur les non-dits, particulièrement diserts lorsqu’ils se logent sur le visage marmoréen de Philip Baker Hall. On ne peut hélas pas en dire autant du couple John C. Reilly/Gwyneth Paltrow, qui prend en charge des rebondissements plutôt pénibles, geignards et surjoués. Lorsque Samuel L. Jackson s’invite dans la danse, le formatage du thriller sans ambition est définitivement atteint. C’est d’autant plus regrettable que les révélations finales sur les liens entre le protecteur et son jeune chien fou avaient de quoi nourrir une intrigue bien plus subtile. Modeste et prometteur, encore brouillon mais loin d’être honteux, ce premier essai navigue entre deux tendances, le bluff lacunaire et le thriller sentimental. Il aurait dû garder la subtilité de la première, mais le cinéaste est bien trop tenté par la seconde, qui fera l’objet d’une exploration plus décomplexée dans les films à venir. | |
| | | Nulladies Cinéman
Nombre de messages : 2734 Date d'inscription : 28/12/2013 Age : 47
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 28 Sep 2016 - 6:42 | |
| Retiens les nuits Boogie Nights est le film de l’envol pour Paul Thomas Anderson : passée la case du premier film, petite copie proprette, il est désormais temps d’affirmer sa singularité. Il est intéressant de voir à quel point cet opus entre en résonnance avec Magnolia : la quasi-totalité du casting est déjà présente, pour un récit d’une durée presque similaire, soutenue par une mise en scène au lyrisme commun. La différence, cependant est de taille : Boogie Nights raconte une communauté, une collectivité, tandis que Magnolia fait le lien entre des âmes esseulées. Ici, l’illusion d’une aventure collective propre aux 70’s est encore vivace, même si elle prendra des coups. PTA, on le sait, mise tout sur la fluidité. Les plans séquences auxquels il recourt dessinent les contours d’une assemblée en pleine euphorie. Du night-club initial à la villa, la caméra passe d’un groupe à l’autre, portée par les mouvements harmonieux de Roller Girl, au milieu d’une collectivité qui croit faire la fête en même temps qu’elle travaille. Des discussions inutiles comme seules les soirées (ici, même de jour) savent en générer à la drogue, des négociations à la représentation de soi, tout est dit en quelques séquences assez virtuoses, la caméra accompagnant les personnages jusque dans la piscine, ce qui n’est pas sans rappeler un autre état des lieux de la décadence festive, le formidable plan séquence initial de Soy Cuba. Le récit initiatique permet d’apposer sur ce nouveau monde un regard assez tendre. Tout d’abord par l’angle technique avec lequel on aborde le milieu du porno, que ce soit par le gimmick assez amusant du regard porté sur les attributs du jeune premier, et qu’on nous révélera au dernier plan ; les équipes sont des pros, et ont le goût d’un travail bien fait, dans une ambiance d’entreprise familiale portée par la star locale, Juliane Moore en mère aussi attachante que déviante. Car c’est là l’un des enjeux du film : traiter de l’artisanat d’une industrie avant l’avènement de la vidéo dans les années 80. Le portrait d’un âge d’or est à la limite de l’hagiographie, même si l’on prend soin de saupoudrer le tout de quelques égratignures à coups d’overdoses et de pétages de plomb, notamment grâce à la belle idée du mari trompé par sa femme nymphomane, signe d’une libération sexuelle qui ne se fait pas sans dégâts. Le metteur en scène explique l’enjeu : retenir le spectateur quand il a joui. Son idéal, faire un véritable film, est bien entendu le défi relevé par Anderson, qui ajoute au clinquant musical et affriolant la chair de personnages qui souffrent ou se trompent. Car c’est bien la frustration qui se loge dans toutes ces quêtes : celle de la mère ratée qu’est le personnage de Moore, celle du cinéaste non reconnu ou de l’étalon qui doit se maintenir au sommet. Cette notion phare – retenir, que ce soit le talent, le succès, ou l’emprise émotionnelle, est paradoxalement le principal reproche qu’on peut faire à Boogie Nights. Le deuxième pan du film, qui traite en bonne logique de la décadence après la période faste, souffre de lourdeurs et de longueurs vraiment dommageables. Le montage alterné entre les deux bastons, celle de Dirk et de Roller Girl, le projet de braquage qui nous fait dériver vers du Tarantino à la sauce True Romance, les dérives de Dirk qu’on avait pourtant déjà bien identifié comme étant limité dans la première partie, tout procède sur le mode de la démonstration explicite. Et PTA de nous resservir un braquage de plus, permettant par les joies de la coïncidence, à l’un des personnages de récupérer la somme que les banques lui refusaient pour monter son affaire du fait de son affiliation au porno… La coupe est pleine, et on voit très bien comment cette incapacité à conclure conduira à une nouvelle écriture, celle du kaléidoscope Magnolia, autrement plus juste, car assumée dans ses excès. Il n’en demeure pas moins que par la richesse de sa reconstitution, le talent de ses comédiens et la fluidité de sa mise en scène, Boogie Nights marque un début de carrière frappant. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 28 Sep 2016 - 15:30 | |
| Pour moi c'est de moins en moins bon de Hard Eight à Magnolia... heureusement après ça repart en flèche ! Au passage Boogie Nights est quand même un gros, gros, GROS ripoff des Affranchis, malgré le gros capital fun ça m'avait gâché le film. |
| | | guil blacksessions.com
Nombre de messages : 5560 Date d'inscription : 31/08/2011 Age : 53 Humeur : fatigué
| Sujet: Re: En visionnage : DVD / Divx / vhs / Super 8.... Mer 28 Sep 2016 - 22:48 | |
| donc en 2 jours un enchainement je peux pas dire que je sois fan du cinéma asiatique en général, là deux histoires bien ficelées, bien déroulées, une photo magnifique (préférence pour The Host en ce qui me concerne), des décors aussi. mais je reste sur ma faim, dans les 2 cas.... _________________ ça suffa comme ci
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