Flying Saucer Attack j'ai carrément pas souvenir d'avoir écouté ! ça a l'air bien en effet !
Pour MBV, je trouve leurs deux premiers albums tous les deux très bons, simplement le deuxième procure des sensations au sens propre extraordinaires ! Personne n'est allé aussi loin et de façon aussi sensuelle, heureuse. Je veux bien tous les barrouf' du monde mais une défonce dans ce créneau, je crois pas qu'on en ait tant que ça ?! Hendrix ?
Le dernier album des MBV est juste bon sans plus. Et à mon sens cela ne prouve rien d'autre qu'on ne pouvait guère aller aussi loin dans le genre. Ce groupe aurait dû lâcher l'affaire et partir complètement sur autre chose. Oui ils n'étaient pas de pur génie ? Et alors ? Le charme du rock c'est de proposer un art qui permette de toucher la grâce sans être des génies dotés de 30 ans d'études !
Avec un ovni comme Loveless, MBV révèle, il me semble (dans la caricature pour certains), une part de l'esprit du shoeagazing et de la noisy pop.
Avec ses mélodies et ses accords qui se fondent dans des coulées sensorielles machiniques, une des spécificités de ces courants est de vouloir investir cette fois la partie noble et humaine du pop/rock : la mélodie sur ses progressions d’accords, expressions de la volonté humaine, de son idéal de dépassement, de libération... Le rock portait une mélodie sur une rythmique et des accords puissants, libérant certes le corps, mais un corps encore guidé par une tête, mélodique, porté par des mots. Même dans le Velvet qui ouvre la fenêtre dans certains titres machiniques qui animeront le Krautrock. La Dance, très rythmique, de la fin des années 80, héritière de cet esprit rock, porte, à la limite de son genre, l’arrivée du déplacement de la domination du corps sur la mélodie.
Premier laminage de la noisy pop, la fusion intégrale en haut fourneau de la mélodie et de l'harmonie ! Impossible de bien distinguer où commence l’une et où finit l’autre. Deuxième recette du genre, cette fusion libère ici un corps machine de désirs, car cette fusion ne doit rien à une reproduction naturelle. Elle est essentiellement machinique, faite de bruits blancs. Oui la spécificité de ce bruit, bien coutumier en rock, souvent bruit de révolte, c’est d’être ici un bruit mélodique ! Ca c’est du concept coco !
Pauvre petite machine sans volonté, c’est aussi celui d’être un bruit qui vous traverse plus que vous ne le portez. Avez-vous déjà fredonné une mélodie de noisy pop ? Pas trop tant elles sont noyées ? Difficile dans ces conditions de distinguer encore une expression humaine en mots… Laissez aller !
C’est que les mélodies de la noisy pop sont le plus souvent d’une simplicité étonnante, naïve, extrêmement passive, languissantes comme des bossas de centrale électrique. Tellement fragiles, sans consistance qu’elles se laissent porter par tous les courants alternatifs branchés. Le corps dans cette noisy pop est d’une passivité totale en charge de transmettre des énergies surpuissantes, sans opposer trop de résistance, sans relief ! Pas de riffs qui dépassent, mais des rythmiques qui syncopent, derrière (merci) la Dance, plus qu’elles ne martèlent *. On s’abandonne à des passions de machines !
Loveless va au cœur. Il ne remplace pas l’humain par la machine, ne sort pas l’humain de lui-même comme souvent le krautrock. Oui assumons-nous vraiment enfin comme machine, cessons d’être seulement ces trains, ces autoroutes, ces robots !... Loveless ne tente pas seulement de transformer notre corps, nos jambes, notre rythme, en machine, mais notre intériorité la plus profonde. Il transforme notre cœur, sa mélodie et sa sentimentalité en machine désirante *. Oui, oui, donnons-nous enfin une humanité de machine !
Pas étonnant que cette drôle de mission ait incombé au cœur de la vieille Europe, encore debout moralement, et non à l’Amérique trop iconoclaste, à l’Allemagne fuyant tout à la fois son passé et son humanisme vers l’au-delà et l’infini, mais ait incombé au pays de la pop, l’Angleterre.
Que reste-t-il aujourd'hui de Loveless ? Difficile de réussir à mener l'humanité aussi loin... Aujourd’hui on en retrouve des traces, et certains égarements probablement, dans la chillwawe, certains psychédélismes, le premier MGMT, et autres Tame Impala…
* oui quand même dans Ride ça se discuterait....
* A chaque fois que j’écoute Loveless je pense à Demonlover !
Deux anecdotes, Loveless me rappelle :
- Deux super journées passées à Brastislava, début des années 90, à boire du thé et autres avec un couple d’anglais qui avait un look de pochette à la Smiths et qui connaissaient les musiciennes de MVB, qu’ils considéraient comme totalement barrés.
- Cette période difficile quand même, où j’écoutais le soir en bossant Bernard Lenoir avec un déluge de noisy pop et de grunge !! Certains soirs étaient terribles !!!